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Théâtre - Entretien

Le Sourire au pied de l’échelle de Henry Miller, adaptation Ivan Morane, mise en scène Bénédicte Nécaille

Le Sourire au pied de l’échelle de Henry Miller, adaptation Ivan Morane, mise en scène Bénédicte Nécaille - Critique sortie Théâtre Paris Le Cirque Électrique

Le Cirque Électrique

Publié le 21 février 2022 - N° 297

Après l’avoir créée avec succès en janvier 2019 au Théâtre de l’Œuvre, Bénédicte Nécaille reprend sous chapiteau sa mise en scène du texte de Henry Miller, au Cirque Électrique. Un charme supplémentaire pour cette bouleversante traversée d’une vie, avec dans le rôle du clown Denis Lavant.

Pour quelles raisons vous êtes-vous emparé de ce texte plutôt méconnu et à part dans l’œuvre du romancier américain Henry Miller ?

Bénédicte Nécaille : Ce texte est en effet très à part dans son œuvre et méconnu, si ce n’est des circassiens qui s’intéressent au clown. C’est l’une des œuvres qu’il aimait le plus, avec Le Colosse de Maroussi, récit lumineux qui fait suite à un voyage en Grèce. Écrit dans l’antre isolée de Big Sur en Californie, Le Sourire au pied de l’échelle a répondu à une commande de Fernand Léger sur le clown, et a finalement été édité par un autre biais car l’écrivain n’a pas aimé les illustrations du peintre. Le texte dense et très beau raconte quelque chose d’intime sur l’art, sur la création, en exprimant à travers le parcours et le personnage du clown Auguste le fait qu’on ne peut échapper à qui on est profondément. Miller y traduit une expérience métaphysique, mystique de l’existence, que l’adaptation condensée d’Ivan Morane transpose à la première personne.

« Le texte dense et très beau raconte quelque chose d’intime sur l’art, sur la création. »

Qui est ce clown ?

B.N.: C’est un vieux clown qui raconte ce qu’il a vécu et ne fait guère le clown, mis à part lors d’une scène. Dans un vieux chapiteau, il tourne en rond, il lui reste trois bords de piste qui se transforment en roulotte, piste ou loge, une valise vide qu’il trimballe, et quelques accessoires. Il a d’abord connu un succès considérable, puis l’errance, et à nouveau le succès lorsqu’il a remplacé un clown malade dans un cirque ambulant. À l’image de l’échelle, qui dans notre décor teinté d’absurde est inspirée d’un tableau de Miro que j’aime particulièrement, intitulé Chien aboyant à la lune, le clown traverse plusieurs épreuves et accède à un niveau autre de conscience et de compréhension de l’existence. « Entre le monde et lui se dresse le rire» affirme l’auteur. Face aux attentes, aux leurres et aux facilités trompeuses, Auguste cherche sa place, cherche du sens au fil d’une quête bouleversante. Car si le succès le grise, il ne l’aide pas à vivre.

Avez-vous immédiatement pensé à Denis Lavant pour l’interpréter ?

B.N.: Je l’ai trouvé remarquable dans Faire danser les alligators sur la flûte de pan mis en scène par Ivan Morane, et peu de temps après dans le film L’étoile du jour de Sophie Blondy (2016), où il interprète un clown. Il se trouve que comme moi Denis connaît ce texte depuis longtemps. Il a cette sensibilité et cette profondeur de jeu qui lui permettent d’habiter le rôle d’Auguste dans son ambivalence et son exigence. Il possède aussi une grande plasticité rendant possible l’interprétation de tous les personnages. Et il joue de plusieurs instruments à vents, ce qui apporte une dimension musicale à la pièce. La mise en scène et le jeu ne racontent pas tout, ne ferment pas le sens. J’aime lorsque l’imagination demeure active.

Propos recueillis par Agnès Santi

A propos de l'événement

Le Sourire au pied de l’échelle
du mercredi 30 mars 2022 au dimanche 17 avril 2022
Le Cirque Électrique
Place du Maquis du Vercors, 75020 Paris

du mercredi au samedi à 21h, dimanche à 18h. Relâche le 14. Tél : 09 54 54 47 24.

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