Cléopâtre in love de Christophe Fiat, mise en scène par Claire Ingrid Cottanceau, Christophe Fiat et Judith Henry
Performance historico-pop, Cléopâtre in love [...]
Après Le Direktør* en 2017, le metteur en scène Oscar Gómez Mata revient à la Comédie de Genève avec une nouvelle œuvre de Lars von Trier. Il crée Le Royaume, d’après la première saison de L’Hôpital et ses fantômes (Riget), série télévisée imaginée par le cinéaste danois en 1994.
Dans Riget, série présentée en France sous le titre L’Hôpital et ses fantômes, Lars von Trier nous ouvre les portes du Rigshospitalet, hôpital de Copenhague (surnommé Le Royaume) au sein duquel le réalisateur danois entremêle les codes et les intrigues d’un feuilleton hospitalier, d’une comédie burlesque et d’un film d’épouvante. C’est la première saison de cet objet télévisuel devenu culte qu’Oscar Gómez Mata porte aujourd’hui à la scène. Le metteur en scène d’origine espagnole (qui a créé à Genève, en 1997, la Compagnie L’Alakran) en signe lui-même l’adaptation (en collaboration avec Aymeric Demay et Jean-Daniel Piguet), projetant l’œuvre de Lars von Trier dans un univers de farce théâtrale nourrie de nombreux clins d’œil et effets clownesques. Sur scène, un groupe de dix comédiennes et comédiens endosse ainsi les rôles de personnages aux forts accents parodiques : médecins arrogants et incompétents, infirmières et infirmiers à l’intelligence très relative, employés de cuisine atteints de trisomie… Se mêle à cette communauté une vieille femme extralucide qui s’invente des maladies imaginaires afin de fréquenter l’hôpital et de venir en aide au fantôme d’une petite fille assassinée, en ces mêmes lieux, au début du XXème siècle.
Le sillon du ridicule
Résolument loufoque, le spectacle incarné par Pierre Banderet, Valeria Bertolotto, Claire Deutsch, Vincent Fontannaz, Christian Geffroy Schlittler, David Gobet, Camille Mermet, Aurélien Patouillard, Bastien Semenzato et, en alternance, Alma Boccadoro et Clélia Brander, se réapproprie Riget avec pour souci essentiel d’imposer la réalité du présent théâtral qu’il invente devant nous. Ce présent s’attache à créer toutes sortes de passerelles entre les acteurs et le public, entre l’œuvre originelle et le cadre de la représentation. Cela, comme le déclare Oscar Gómez Mata, afin de stimuler la pensée des spectateurs et d’établir un dialogue avec eux. Pourtant, les successions de gags qui surchargent Le Royaume enferment davantage la perception que l’on peut avoir de la série de Lars von Trier qu’elles n’ouvrent des perspectives d’imaginaire et de réflexion. Car cette proposition, renvoyant à une forme de système, finit par paraître monotone et simpliste. Effets de travestissement, jeux de perruques, ruptures dramaturgiques, refus de l’illusion théâtrale creusent, durant trois heures et trente-cinq minutes, le sillon de l’artifice et du ridicule. Les amateurs d’humour potache auront mille occasions de rire. Les autres chercheront vainement des points d’accroche leur permettant d’envisager autrement les paradoxes des événements qui rythment la vie du Rigshospitalet.
Manuel Piolat Soleymat
* Spectacle repris du 8 au 15 février 2019 à la Comédie de Genève et présenté du 12 mars au 4 avril au Théâtre de la Bastille à Paris.
Du mardi au jeudi à 19h30, le vendredi à 20h, le samedi à 18h. Le dimanche 3 février à 16h. Durée de la représentation : 3h35 avec entracte. Tél. : +41 22 320 50 01. www.comedie.ch
Egalement au Théâtre Vidy-Lausanne du 5 au 9 mars 2019.
Performance historico-pop, Cléopâtre in love [...]