Le Double d’après Dostoïevski, mis en scène par Ronan Rivière

« Le Double est un des premiers écrits de Dostoïevski, qu’il qualifie de poème pétersbourgeois. Il s’y est fortement inspiré des nouvelles de Gogol et notamment du Manteau. Son héros, Goliadkine, est un fonctionnaire parmi tant d’autres dans cette ville de Saint-Pétersbourg du début du XXème siècle, en plein essor technocratique. Un jour, Goliadkine voit arriver dans son bureau, au Ministère, un homme qui lui ressemble beaucoup et qui paraît vouloir prendre sa place, à la fois au travail et auprès de la fille de son chef de cabinet, dont il est amoureux. Mais lui seul paraît s’apercevoir que cet homme est un double qui tente de prendre sa place. Et son entourage fait comme si de rien n’était.

Un personnage très touchant

Goliadkine fait face à un véritable Méphistophélès et je trouve très émouvant de le voir se débattre. La narration originale est conduite dans la tête du personnage, si bien que cela permet de faire de Goliadkine un personnage à la fois drôle et très touchant. C’est tragique et comique à la fois, et cela entre en résonance avec l’un des maux modernes, qui est cette difficulté à trouver sa place dans la société et à rompre son isolement. J’ai déjà monté Le Revizor de Gogol et Le roman de Monsieur Molière de Boulgakov. Je suis très sensible à cet univers russe et j’essaie de faire de mes adaptations des lectures de plus en plus personnelles. Ici, on tire l’adaptation vers le fantastique, car on ne sait pas si Goliadkine est fou, à la différence du roman. Scéniquement, on s’inspire du constructivisme pour créer un décor amovible et labyrinthique, qui accompagne les méandres que parcourt le héros. »

Propos recueillis par Eric Demey