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Avignon / 2024 - Entretien / Ahmed Madani
Après le cycle Face à leur destin, créant un espace de rencontre de belle intensité avec des jeunes des quartiers populaires, Ahmed Madani ouvre un nouveau cycle, Nous sommes vous. Un groupe de jeunes comédiens et comédiennes* issus de l’École des Teintureries à Lausanne y interroge leur désir de théâtre : une recherche intime, profonde et inédite, célébrant notre commune humanité.
Quel est ce nouveau cycle que vous initiez avec cette création ?
Ahmed Madani : Ce cycle qui éclaire à nouveau la jeunesse engage une réflexion sur la notion d’altérité, affirmant à travers son titre que ce qui nous unit, c’est notre commune humanité. L’acte symbolique de la mise en scène et la mise en jeu des relations questionnent nos valeurs et pensées respectives, notre futur possible. Entrée des artistes met en scène des jeunes gens et des jeunes femmes qui ont un désir de théâtre. Quand on décide de se tourner vers le théâtre, ou vers l’art en général, on choisit une manière singulière de s’exprimer vis-à-vis des autres et vis-à-vis du monde. C’est une manifestation très singulière de notre être au monde. Se tenir debout sur une scène, c’est faire don de soi en partageant son humanité avec les autres. Ces étudiants en dernière année de l’École des Teintureries à Lausanne (qui a fermé ses portes en juin 2023) ont accepté pour leur spectacle de sortie de répondre à cette question intime, très rarement posée aux gens de théâtre : pourquoi voulez-vous faire du théâtre ? Pourquoi souhaitez-vous faire un acte de poésie face aux autres, pourquoi ne pas choisir l’industrie, la médecine, le commerce… ? Pourquoi vous démarquer en consacrant votre vie à mettre votre corps sur une scène et à l’offrir aux autres ? Comment le milieu familial reçoit-il ce désir ?
Par quel processus leurs réponses se sont-elles construites ?
A.M. : Ils ont accepté de parler d’eux-mêmes pendant des semaines et des semaines. Ma façon de travailler vise à faire sortir les mots non-dits, dans une espèce de maïeutique, d’accouchement de soi-même. Je leur ai demandé de me raconter leur premier émoi d’art, de décrire la place de l’art et de la culture au sein de leurs familles, de livrer leurs motivations les plus profondes, leurs doutes, leurs espoirs… Aucun n’est un enfant d’artiste, et souvent les parents conseillent à leur enfant de passer d’abord un diplôme. Très souvent la première scène théâtrale, c’est la scène familiale riche de ses rôles, dont les relations sont exposées dans le théâtre antique, classique et même contemporain ! Nous cheminons ensemble, dans une mise à nu et même une mise en danger qui peut avoir un effet de renforcement – très affirmé par certains – ou d’abandon. Ils ont creusé dans leurs mémoires, et se racontent sans fard avec humour ou gravité. Ma démarche consiste à faire coïncider leur savoir-faire et leur savoir être, à faire primer le savoir être.
Quel théâtre voulez-vous faire émerger avec ce travail ?
A.M. : J’épure complètement mes spectacles, j’en arrive à cette chose extrêmement simple qui est de mettre une ou des personnes face à nous qui nous racontent une histoire. Plus cette histoire est sensible et bien formulée, plus se noue un échange fort entre les interprètes et les spectateurs, qui fait qu’on se reconnaît dans l’autre. C’est par cette reconnaissance mutuelle que l’acte artistique est fort. Il est une invitation à voir la grandeur qui est en nous et qu’on ignore, qu’on soit d’un côté de la scène ou de l’autre.
Propos recueillis par Agnès Santi
*Dolo Andaloro, Aurélien Batondor, Jeanne Matthey, Rita Moreira, Côme Veber, Igaëlle Venegas et Lisa Wallinger
à 11h, relâche les 3,10 et 17 juillet. Tel : 04 32 76 24 51. Durée : 1h15.
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