Six°, conception de Flip Fabrique et Jamie Adkins, mise en scène d’ Olivier Lépine
Autour du célèbre clown et acrobate Jamie [...]
Dans une nouvelle distribution toujours aussi talentueuse, Frédérique Lazarini éclaire brillamment les enjeux de cette œuvre de jeunesse de Shakespeare, en renouvelant le regard sur l’insoumission de la Mégère. Un spectacle délicieux !
Dans Padoue la superbe, Catarina la rebelle tempête contre son entourage. Sa langue grondeuse rebute tous ceux qui la côtoient. Comment pourrait-elle trouver un époux ? Son père affirme qu’il n’accordera à personne la main de la cadette, la douce et courtisée Bianca, avant que Catarina la méchante ne soit mariée. La tigresse rencontrera bientôt son dompteur, Petruchio, motivé par… la dot. La célèbre intrigue, immortalisée à l’écran en 1967 par le duel titanesque entre Elisabeth Taylor et Richard Burton, plutôt rarement portée à la scène, traverse évidemment la question des relations de domination entre les sexes, et c’est cet aspect qui le plus souvent préoccupe les mises en scène contemporaines. Frédérique Lazarini et les siens proposent une adaptation resserrée qui orchestre à merveille le déploiement et les tumultes du sentiment amoureux et de la guerre des sexes, mais aussi la question du rôle, du jeu, du masque social. Le spectacle reprend un procédé cher au grand Will, une mise en abyme alerte qui mêle divers outils de jeu et diverses époques, jusqu’à l’atmosphère des merveilleuses comédies italiennes des années 50-60, si pleines de tendresse, de férocité, de drôlerie, mettant en lumière les fanfarons et souvent les petites gens.
Mariage à l’italienne
Nous sommes sur la place d’un village accueillant un cinéma ambulant, avec l’écran en fond de scène. Les gradins du théâtre prolongent les bancs installés sur le plateau, tandis qu’entre la scène et l’écran s’articule une relation finement équilibrée, depuis des intermèdes savoureux jusqu’au dialogue entre personnages – l’un filmé à l’écran et l’autre joué sur le plateau. Inscrits dans cet ancrage italien joyeux et exubérant, les comédiens interprètent avec assurance et précision la partition. Après Sarah Biasini et Delphine Depardieu, c’est Alix Bénézech qui endosse le rôle-titre. Cédric Colas est un Petruchio impérieux, énergique et méchant à souhait, Guillaume Veyre interprète excellemment le valet Tranio, en cousin jumeau du mythique Totò, Guillaume Veyre et Hugo Givort complètent la distribution. Quant à Bianca, Charlotte Durand-Raucher lui donne vie dans de piquantes scènes, mais uniquement à l’écran. En ceignant le plateau de linge blanc, la scénographie de François Cabanat fait écho à l’enfermement que constitue l’espace domestique pour les femmes, mais aussi aux si vivantes rues italiennes. Alors qu’on se plaît souvent à accorder des intentions en phase avec notre modernité au génie de Shakespeare – génie incomparable ! –, force est de constater que la chute de la pièce consacre la défaite de la mégère. Mais ici peut-être que cette soumission n’est qu’apparence… Pour finir, s’invite par la voix de Catarina une autre parole particulièrement forte et belle : celle de Virginia Woolf dans Une Chambre à soi, évoquant la « sœur merveilleuse de Shakespeare ». On se souvient de la remarquable mise en scène de ce texte par Anne-Marie Lazarini, avec Edith Scob. Si actuel, si important, cet appel à prendre « l’habitude de la liberté et le courage d’écrire exactement ce que nous pensons » résonne magnifiquement.
Agnès Santi
Mardi 20h, mercredi et vendredi 20h45, jeudi 19h ; samedi 18h et 20h30 ; dimanche 15h, relâche lundi. Tél : 01 43 56 38 32. Durée : 1h25. Spectacle vu en janvier 2020 à l’Artistic Théâtre.
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