La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Etat des lieux de la danse en France

Chaillot, Théâtre National dédié à la danse

Chaillot, Théâtre National dédié à la danse - Critique sortie
© Nicolas Krief

Publié le 30 novembre 2011

Depuis 2008 et sa surprenante conversion à la danse, le Théâtre National de Chaillot est singulièrement ballotté. Didier Deschamps, consensuel militant de la danse, a pris les rênes de la maison mythique en juillet. Pour la placer sur quels rails ?

Après quelques années perturbées, Chaillot retrouve-t-il un semblant de calme ?
Didier Deschamps :
On m’avait dit avant de venir ici que la maison avait un passif très lourd, était dans une situation de blocage, avec une grande résistance à toute forme d’évolution. Et j’observe tout l’inverse. Je ressens l’attente de tourner une page. Mon rôle est maintenant de donner du sens à l’action du théâtre. Tant en interne que vis-à-vis de l’extérieur.

« Il a toujours fallu se battre pour la danse. Pour un respect intellectuel de la discipline et pour le respect des personnes qui la pratiquent. »

On craignait que de par sa taille, le Théâtre de Chaillot ne soit le lieu d’une danse conventionnelle, qu’en sera-t-il ?
D.D :
Je suis très concerné par les démarches et créations des acteurs de la scène contemporaine mais aussi passionné à l’idée de pouvoir faire résonner ces objets  avec les éléments de notre mémoire. L’histoire n’enferme pas, elle sert de planche pour se projeter dans de nouvelles aventures. 

Quelle sera donc votre ligne ?
D.D :
Ce lieu a historiquement une dimension politique, liée au théâtre national populaire et à l’idée d’un service public de la culture. D’autant plus que la salle Jean Vilar se trouve sous le parvis des droits de l’Homme. Je tiens donc à ce que le lieu abrite aussi des expositions, des conférences, des films, des débats afin de réhabiliter ce lieu qui souffre d’une architecture froide. Globalement, mon but est d’élargir les rencontres entre disciplines. J’ai envie que le public ne soit pas trop spécialisé, qu’il y ait un brassage pour que les gens s’intéressent à de multiples formes.

Quitte aussi à louer les espaces ?
D.D :
La location de salles a longtemps été considérée comme diabolique. Mais tant qu’on reste dans des équilibres et des logiques qui ne contreviennent pas à notre mission première, je considère que cela permet aussi de rencontrer d’autres secteurs desquels la culture a trop tendance à se couper. Cela n’empêche pas par ailleurs de se battre pour avoir davantage de subventions.

Chaillot devait aussi se rapprocher de Pantin pour former « un pôle international de référence » dit le ministère. Est-ce une menace pour l’avenir ?
D.D :
Il n’y a pas de perspective de fusion. Ce n’est ni dans notre lettre de mission, ni dans notre envie. Avec Pantin, nous sommes exactement sur la même longueur d’onde. 

On craignait également que l’offre supplémentaire de danse soit excessive au regard des structures déjà en place à Paris ?
D.D :
L’offre n’est pas excessive. La preuve : le public du théâtre de la Ville ou de Vanves ne s’est pas tari. Je revendique d’ailleurs que la danse puisse s’adresser à un public le plus large possible. 

Chaillot est-il aujourd’hui un vrai Théâtre National ?
D.D :
Un Théâtre National doit être un lieu où vivent des artistes. José Montalvo est maintenant artiste associé permanent, avec une mission recentrée sur sa création, et nous sommes en train de mettre en place une politique de résidence d’artistes venus du théâtre ou de la danse. Mais nous manquons cruellement de salles de répétition, et il faut pour les résidences des moyens budgétaires appropriés. 

Finalement, qu’on destine prioritairement le lieu à la danse ou au théâtre, cela a-t-il encore un sens ?
D.D :
Quand j’étais au Ministère, nous avions un débat sur la refonte des CDN et CCN en maisons du spectacle vivant. Cela n’a pas abouti car trop de gens ont peur de perdre leurs prérogatives. Mais c’est important que ce soit quelqu’un venu de la danse qui dirige le lieu. Il a toujours fallu se battre pour la danse. Pour un respect intellectuel de la discipline et pour le respect des personnes qui la pratiquent. Et c’est encore le cas. Même si artistiquement les lignes ont bougé, économiquement et institutionnellement, la danse n’est pas encore reconnue comme les autres arts. 

Propos recueillis par Eric Demey

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