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Au travers d'un virtuose seul en scène au [...]
Avignon / 2024 - Entretien / Franck Régnier
Michelle s’est prise en photo devant les baraquements d’Auschwitz lors d’un voyage scolaire, a posté sa photo sur les réseaux sociaux qui se sont emballés. Sa bêtise mérite-t-elle tant de haine ?
Comment avez-vous choisi ce texte ?
Franck Régnier : Ce spectacle est la troisième création de la compagnie Nandi, qui monte du théâtre contemporain et des auteurs vivants. J’avais envie, cette fois, d’une problématique de société. Les thèmes du harcèlement, du cyber-harcèlement et du devoir de mémoire qu’aborde le texte de Sylvain Levey m’ont particulièrement interpellé et conduit à choisir de le mettre en scène. Le texte est inspiré de l’histoire de Breanna Mitchell, une ado américaine, dont le selfie a fait mondialement scandale en 2014. Sylvain Levey s’en inspire pour le personnage de Michelle, qui, lors d’une visite du camp d’Auschwitz, se prend en photo devant les baraquements et provoque un torrent de haine sur les réseaux sociaux en y postant ce selfie. Sylvain Levey raconte l’histoire sans parti pris. Il ouvre des questions mais ne juge pas moralement le geste de Michelle.
Comment le mettez-vous en scène ?
F.R. : Le texte est fait de petites scènes courtes et rapides : les comédiens disent les SMS, les emojis, comme dialoguent entre eux les ados sur les réseaux. Comme le fait divers et les thèmes sont assez pesants, j’ai essayé d’apporter un peu de poésie. Avec la scénographe, Andréa Warzee, nous avons voulu une ambiance aérienne, avec des balançoires qui rappelle aussi qu’à 14-15 ans, on est aujourd’hui encore un enfant. Il n’y a pas de vidéo : j’ai voulu m’éloigner des écrans puisqu’on en parle ! La scénographie, épurée et modulable, permet le déploiement d’un vrai travail corporel, dans lequel les moments dansés sont très importants. Huit comédiens sont au plateau, pour un vrai travail de troupe, marque de notre compagnie.
Michelle : bête ou méchante ?
F.R. : À la lecture du titre, on peut avoir un avis tranché. Mais au fur et à mesure du travail, et notamment après les discussions avec les adolescents devant lesquels nous avons beaucoup joué et avec qui le spectacle marche très bien, nos avis ont évolué. Le pire, au-delà de ce geste, c’est ce que subit l’ado qui l’a commis. Je crois que personne ne mérite « va te suicider ! » pour un tel geste. Quand les ados viennent me voir, à l’issue de la pièce, pour dire qu’ils n’auraient jamais agi comme ça, il y a toujours des adultes, parents ou profs, pour dire que, parfois, ils font parfois pire ! C’est cette ouverture de la parole qui m’intéresse. Je trouve que grâce à cette pièce, Sylvain Levey nous laisse libres d’exercer notre regard et notre réflexion sur la société du paraître que nous avons bâtie.
Propos recueillis par Catherine Robert
à 15h40. Relâche le mardi. Tél. : 04 90 86 14 70. Durée : 1h05.
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