Avignon / 2024 - Entretien / Fanny Chériaux
« Venise, récit chanté d’un corps », Fanny Chériaux raconte l’épopée pop de son corps, accompagnée par Nicolas Bonneau à la mise en scène
Le 11 · Avignon / écriture, conception et musique de Fanny Chériaux / mise en scène de Fanny Chériaux et Nicolas Bonneau
Publié le 3 juin 2024 - N° 323Fanny Chériaux, venue au festival en 2022 avec Nicolas Bonneau pour Monte-Cristo, raconte cette fois l’épopée pop de son corps, devenu personnage. Thomas Couppey et Sébastien Dalloni l’accompagnent.
Comment votre corps est-il devenu personnage ?
Fanny Chériaux : Le spectacle est né d’une chanson, Venise, que j’ai écrite avec l’idée de créer un concert. Thomas Couppey et Sébastien Dalloni ont imaginé une chorégraphie rigolote sur cette chanson, et nous avons décidé qu’ils participeraient au spectacle. C’est alors qu’ils m’ont proposé de danser avec eux. J’étais pleine de complexes à cette idée. Je me suis alors demandé pourquoi c’était si compliqué d’ainsi mettre mon corps en scène et j’ai voulu retracer son histoire, de ma naissance à aujourd’hui, pour élucider ma manière de l’appréhender et les influences qui l’ont pétri. Le spectacle est donc fait à la fois de récits, de musiques, de chansons, de vidéos avec des films super 8 de mon enfance, des extraits de cinéma, pour essayer de comprendre comment s’est forgé mon regard sur mon corps.
« Nos corps sont des productions culturelles. »
Que dit ce corps des autres corps ?
F.C. : Je pars de l’innocence de l’enfance, alors que je suis un corps en mouvement qui bouge, respire, prend du plaisir sans entraves, jusqu’à ce que le regard, le mien et celui des autres, vienne se poser sur lui. La manière dont la société façonne le corps, selon le genre, la classe et les rencontres, s’inscrit dans ma biographie mais ne concerne pas que moi. Nos corps sont des productions culturelles. Les références du spectacle sont celles d’une femme grandie dans les années 80, mais les jeunes s’y retrouvent aussi. Nous vivons aujourd’hui une époque très clivée : on montre, certes, des femmes plus rondes, pas épilées, mais le culte de la perfection physique demeure. Même si de plus en plus de gens refusent d’être assignés à un genre, ces questions sont très actuelles. Les jeunes spectateurs sont en connivence avec ce que raconte le spectacle et je suis contente de voir les débats qu’il fait naître. Quand j’ai grandi, le féminisme était un gros mot, aujourd’hui, la parole est plus libre, mais des archaïsmes demeurent.
Quel est le rôle des danseurs qui accompagnent cette épopée ?
F.C. : Ils sont d’abord des projections de moi, m’incarnent, me suivent, mais deviennent aussi des altérités, parfois malaisantes, parfois bienveillantes, des garçons, des femmes, toutes sortes de personnages, reflets de ce que je raconte. Ils viennent aussi raconter Thomas et Sébastien, qui, eux aussi, ne sont pas tout à fait dans les normes de leur genre. Nous racontons tout cela dans une forme de légèreté, entre comédie musicale et one woman show, sur un ton assez pop. Les choses importantes sont dites en riant, même si ce qu’elles racontent n’est pas toujours plaisant à vivre…
Propos recueillis par Catherine Robert
A propos de l'événement
Venise, récit chanté d'un corpsdu mardi 2 juillet 2024 au dimanche 21 juillet 2024
Avignon Off. Le 11 · Avignon
boulevard Raspail, 84000 Avignon
à 17h10. Relâche le lundi. Tél. : 04 84 51 20 10. Durée : 1h15.