NOSFERATU
Double première : Dracula fait son entrée à [...]
Focus -201-ODEON / THEATRE DE L’EUROPE
Christoph Marthaler est de retour à l’Odéon avec une pièce d’Odon von Horvath, Foi, Amour, Espérance, et avec Meine faire Dame (un laboratoire de langues), pièce musicale inspirée de My Fair lady.
C’est dans une période de crise intense, en 1932, peu après Casimir et Caroline, qu’Odon von Horvath écrit Foi, Amour, Espérance, pièce sous-titrée « une petite danse de mort ». Le récit véridique de son ami Lukas Kristi, chroniqueur judiciaire, lui a inspiré l’intrigue, centrée sur une jeune fille démunie aux prises avec les brutalités de la justice et du pouvoir. Kristi était effaré par « l’application bureaucratique et irresponsable des articles mineurs de la loi » et voulait en rendre compte. La jeune Elisabeth, représentante en lingerie, a besoin pour exercer d’une carte professionnelle. Repérée par la police pour avoir tenter de travailler sans cette carte, elle a décidé de lutter pour s’en sortir mais s’enfonce irrémédiablement dans la spirale de la misère. Christoph Marthaler a déjà mis en scène trois pièces d’Odon von Horvath, et cette pièce, qui donne voix au courage des déclassés, est sa préférée.
Un laboratoire de langues reconverti en groupe de paroles
Avant d’être un film avec Audrey Hepburn, My fair lady fut une comédie musicale à succès de Broadway, et bien avant encore, en 1914, une pièce de George Bernard Shaw intitulée Pygmalion. Le Professeur phonéticien Henry Higgins tente d’y faire de la jeune fleuriste de souche populaire Eliza Doolittle une femme du monde, en lui inculquant les bonnes manières linguistiques. Dans un décor de laboratoire de langues des années 70, conçu par sa fidèle collaboratrice Anna Viebrock, Christoph Marthaler duplique la jeune fleuriste en trois personnages d’âges différents dans une pièce mélancolique et drôle que traversent également un organiste Monstre de Frankenstein, une hôtesse de l’air, des couples qui se disputent sur des airs de comédie musicale… Le spectacle tourne le dos à la narration linéaire pour s’embarquer dans un théâtre musical qui traque le détai, cherche une émotion qui se rit de la théâtralité pour faire rejaillir l’humain dans toute sa fragilité. C’est en effet avant tout cette souterraine musique de l’âme qu’inlassablement Marthaler tente d’exprimer, et que les élèves de ce laboratoire de langues reconverti en groupe de paroles font entendre.
éric Demey
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