La Fin de l’homme rouge et Les Naufragés d’Emmanuel Meirieu

« Je raconte tout le temps la même chose… Je raconte la mort de l’idéal innocent chez les êtres humains. L’histoire des Naufragés est celle de son auteur, Patrick Declerck qui, alors étudiant en anthropologie, s’intéresse aux clochards de Paris. Commence une série de nuits en immersion avec eux, au centre d’hébergement d’urgence de Nanterre. Il fonde ensuite la première consultation psychologique pour clochards, en bottes montantes pour éviter la morsure des poux, loin du confort du divan analytique. Il est comme un infirmier de guerre, au front avec ceux dont il essaie de réparer l’âme. Il raconte son échec absolu et l’impression, parfois éprouvée, d’en condamner certains. Declerck est un explorateur de l’humain, son histoire est celle d’un homme qui brûle son âme.

Aimer plutôt que rire

C’est cela qu’on retrouve dans La Fin de l’homme rouge de Svetlana Alexievitch, qui a recueilli la mémoire de l’URSS en sept livres qui n’en forment qu’un : le naufrage d’une utopie. J’ai conservé sept témoignages, sept tragédies personnelles fracassées par la grande Histoire. Je suis amoureux de mes personnages. J’aime leurs leçons de vie et de courage. Ils ne sont certes pas rigolos, mais ils sont tous magnifiques. Mes spectacles ne sont ni déprimants ni pessimistes. Ce qui est terrible, c’est de montrer des êtres vils. Montrer de la belle humanité fait du bien. Et voir des gens qui ont un idéal plus grand qu’eux-mêmes désintoxique du narcissisme. »

Propos recueillis par Catherine Robert