« Fréquenter les villes active l’imaginaire. »
En 2008, Erik Truffaz publiait trois disques autour de trois grandes villes : Paris-Mexico-Bénarès. A l’occasion de son concert en trio, le trompettiste évoque son goût pour la ville.
Comment la thématique de l’homme dans la ville résonne-t-elle dans votre musique ?
Erik Truffaz : Avec Sly Johnson, un chanteur qui a une palette très large, et Philippe Garcia, un batteur qui tâte de l’électro, nous faisons une musique qui s’articule entre le hip-hop, la drum’n’bass, le dub et le jazz. C’est-à-dire des musiques à forte résonance citadine. La ville est à mon sens synonyme de groove, de rythmes et d’électricité. La campagne, c’est plutôt l’espace, une atmosphère planante et éthérée. Moi, je me situe entre les deux. J’habite dans une zone rurale, mais je suis en tournée dans les villes du monde entier. Dans mes groupes, j’ai toujours apporté la notion d’espace, de quasi-silence, mais en même temps c’est aussi moi qui compose les musiques, où l’aspect rythmique peut être primordial.
« La ville est à mon sens synonyme de groove, de rythmes et d’électricité. »
Pourquoi avoir choisi trois noms de villes, Bénarès/Mexico/Paris, pour votre récent triptyque discographique ?
Erik Truffaz : Cela raconte le cheminement musical par lequel je suis passé. Bénarès est une ville où je vais régulièrement passer un mois l’hiver. Il s’agit d’une vieille cité avec une ambiance déconcertante. Pour Mexico, j’y ai eu l’idée du projet avec Murcof, le producteur mexicain. Et Paris aurait pu se nommer Londres, tant la musique que nous jouons est marquée par l’ambiance britannique, mais comme Sly et moi sommes identifiés à la France…
Chacune de ces villes a un son différent ?
E. T. : Bien sûr. Quand tu arrives de Calcutta, où j’ai enregistré mon album « indien », et que tu atterris à Paris, c’est comme si tu te retrouvais à la campagne. Entre les gens qui hurlent et les klaxons, c’est un boucan invraisemblable ! C’est le chaos total ! Fréquenter les villes active l’imaginaire. Que ce soit des villes confortables comme Porto ou dangereuses comme celles d’Amérique centrale où je viens de faire une tournée. Je me balade beaucoup dans les villes. Récemment, j’ai marché des heures à Berlin. C’est l’une des villes qui reflète le plus la musique alternative. Je me suis retrouvé dans des endroits grands comme mon bureau, des espèces de squats, avec des performances sidérantes. La force de Berlin est que cette capitale reste accessible aux artistes, contrairement à Paris, où les loyers sont trop élevés et où les politiques sont moins permissives. Cela a une incidence sur la création.
Propos recueillis par Jacques Denis
Erik Truffaz, dimanche 17 janvier à 16h30.