La Terrasse

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Entretien Jean-Louis Benoit

Entretien Jean-Louis Benoit - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 septembre 2008

Réflexion sur le pouvoir

Jean-Louis Benoit inaugure cette année itinérante avec la création de De Gaulle en mai, premier spectacle de la saison de la Criée qui se jouera in situ avant les travaux.

La Criée sera en travaux de novembre à mai. Comment gérez-vous la situation ?
Jean-Louis Benoit : Comme la plupart des théâtres qui traversent des travaux, en allant jouer ailleurs ! Nous avons contacté des théâtres marseillais qui nous ont proposé des créneaux d’accueil. Nous sommes parvenus à monter une petite saison, avec onze spectacles au lieu des dix-huit habituels, des créneaux plus courts, des salles plus petites. Etre absent pendant toute une saison, c’est disparaître dangereusement et c’est perdre du public. La délocalisation impose des contraintes, mais finalement, ça ne me déplait pas ! Le vrai problème, c’est que nous ferons moins de recettes hors les murs, or nous fonctionnons avec environ 30% de recettes propres. La subvention de la Criée, pourtant un des plus grands CDN de la Région PACA, n’est pas énorme. Seuls l’Etat et la ville nous subventionnent, la Région ne nous donne rien et la part artistique pour créer, coproduire et accueillir est d’autant plus réduite que les travaux nous obligent à des frais supplémentaires.
 
L’année de l’anniversaire de 68, vous montez un spectacle sur De Gaulle. Provocation ?
J.-L. B. : Ce spectacle n’est pas un hommage à De Gaulle ! C’est même assez cruel sur le bonhomme ! Je voulais parler de 68 en ce quarantième anniversaire mais je cherchais l’angle d’attaque. 68 pour moi, c’est l’âge d’or ! Est née cette année-là toute l’effervescence des années 70. C’est incroyable le nombre de choses qui sont nées à ce moment-là, des revues, des idées, des théâtres, comme la Cartoucherie où nous construisions notre théâtre. J’ai une grande nostalgie de ces années où le débat était permanent, où on parlait politique sans honte, où on avait l’impression de construire et de travailler pour l’avenir.
 
« Ce spectacle n’est pas un hommage à De Gaulle ! C’est même assez cruel sur le bonhomme ! »
 
Vous avez construit votre spectacle à partir du journal de Jacques Foccart.
J.-L. B. : En effet, je suis tombé sur son Journal de l’Elysée, paru il y a une dizaine d’années. Foccart, le « Monsieur Afrique » de l’Elysée, était le conseiller de De Gaulle. Mais davantage encore, cet ancien résistant était le compagnon, l’intime, le confident de De Gaulle avec lequel il s’entretenait quotidiennement. On trouve dans son journal des observations minutieuses, les dialogues avec le général reproduits et même les engueulades. Ce qui transparaît dans ces textes, c’est d’abord le désarroi profond d’un homme qui ne comprend rien à ce qui se passe. De Gaulle apparaît comme un homme du 19e siècle, autoritaire, partisan de la méthode forte contre les « gamins rigolos » qui s’agitent dans les rues. D’autres souvenirs que ceux de Foccart nourrissent le spectacle. Ce que j’ai voulu montrer, c’est comment ce pouvoir, qu’on n’imaginait pas être déstabilisé, l’a été et comment l’Etat a pu vaciller et quasi tomber. Quel rapport entretient le héros avec le pouvoir ? La question se pose à propos de De Gaulle, comme elle se pose dans d’autres spectacles de la saison, notamment les deux pièces de Corneille et celles de Shakespeare.
 
Propos recueillis par Catherine Robert


De Gaulle en mai, d’après Le Journal de l’Elysée de Jacques Foccart et autres textes organisés et mis en scène par Jean-Louis Benoit. Du 7 au 31 octobre 2008. Mardi et mercredi à 19h ; jeudi au samedi à 20h ; dimanche à 15h ; relâche le 12 octobre. Théâtre de la Criée.

A propos de l'événement



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