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Entretien Célie Pauthe

Entretien Célie Pauthe - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 septembre 2008

Le théâtre et le cinéma dans un même geste

Célie Pauthe met en scène S’agite et se pavane, l’un des derniers textes d’Ingmar Bergman. Un retour aux sources du théâtre et du cinéma. Une mise en abyme foisonnante et vertigineuse.

Quels sont les courants thématiques qui vous paraissent fondamentaux dans ce texte ?
Célie Pauthe : Ecrite en 1993, c’est l’œuvre d’un vieil homme qui, sachant qu’il va mourir, jette un regard sur ses passions les plus profondes : le théâtre et la troupe, le cinéma des origines, la musique. Parallèlement à ces trois points essentiels, c’est sans doute le texte dans lequel Bergman ose le face-à-face avec la mort le plus courageux, le plus ironique. Il met la mort en jeu pour l’apprivoiser, la fréquenter au plus près, lui livrer un combat à travers l’acte de création.
 
Cette œuvre peut également être envisagée comme une forme de manifeste esthétique…
C. P. : Oui, et c’est l’une des choses qui me fascinent dans ce texte. Car, Bergman donne naissance à une utopie magnifique : réunir le théâtre et le cinéma dans un même geste, un même temps, un même lieu. Dans cette pièce, il scelle l’interdépendance de deux arts qui n’ont, pour lui, jamais existé l’un sans l’autre. L’histoire raconte le trajet d’un groupe de personnages qui, dans les années 20, va tenter de créer le premier film parlant vivant de l’histoire de la cinématographie, c’est-à-dire un film muet dont les dialogues sont dits, en direct, par des acteurs placés derrière l’écran de cinéma. Mais, le jour de la première, la cabine de projection prend feu. Les comédiens décident alors de jouer le film devant les quelques villageois réunis pour l’occasion. Le cinéma laisse ainsi la place à un théâtre improvisé : on remonte à la source la plus nue de l’échange entre spectateurs et comédiens. En réinventant le cinéma, Bergman retrouve le théâtre. Tout cela sur un mode mineur et assez étrange, avec l’impression que les choses nous glissent entre les doigts.
 
 « En réinventant le cinéma, Bergman retrouve le théâtre. »
 
Qu’entendez-vous par là ?
C. P. : S’agite et se pavane dégage ce que l’on pourrait presque appeler de la tendresse, une forme de douceur. Car Bergman — tout en conservant un regard extrêmement lucide sur les gouffres de la condition humaine, sur notre rapport à la mort, à la folie, au néant — fait preuve d’amour et de compassion à l’égard de ses personnages. La manière dont il les suit, sans jamais les lâcher de la main, est très touchante. Il les confronte à l’échec, mais l’utopie demeure derrière l’échec, ainsi que la beauté : la beauté d’êtres qui révèlent une humanité fragile et démunie.
 
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat


S’agite et se pavane, d’Ingmar Bergman ; mise en scène de Célie Pauthe. Du 16 au 24 janvier 2009 à 20h ; relâche les 18 et 19 janvier. Théâtre du Merlan.

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