Entretien André Engel
La Double mort de l’horloger André Engel [...]
Focus -210-Théâtre National de Chaillot
Le Théâtre National de Chaillot accueille des artistes pour une résidence au long cours. Pour le théâtre, le metteur en scène David Bobee. Pour la danse, deux chorégraphes de génération et de parcours différents : Alban Richard et Daniel Dobbels.
Alban Richard a fondé l’ensemble l’Abrupt en 2000, en s’entourant d’un groupe de partenaires fidèles : des danseurs, mais aussi Nathalie Schulmann, analyste du mouvement, ou Valérie Sigward, écrivain et créatrice lumières. C’est avec eux qu’il instaure son univers, marqué par des matières corporelles intenses. Du 5 au 7 mars 2014, il présentera Et mon cœur a vu à foison, « soirée chorégraphique, musicale et théâtrale », nouvelle étape dans son exploration des images qui appartiennent à notre patrimoine commun et imprègnent nos imaginaires : il s’inspirera de l’iconographie de l’apocalypse, des possessions démoniaques, mais également de celle des hôpitaux de Charenton et de la Salpêtrière, qui entre étrangement en écho avec les images apocalyptiques. Une iconographie de la dévastation, dans laquelle le corps féminin est omniprésent – et c’est précisément pour l’interroger sous un jour différent qu’Alban Richard fait le choix de travailler avec douze interprètes exclusivement masculins. « Ce sera une traversée, un exorcisme afin de faire affluer nos démons, » décrit le chorégraphe, qui présente aussi un ambitieux projet avec un groupe de danseurs amateurs.
Daniel Dobbels : « cette très étrange mémoire »
Daniel Dobbels crée Les Écrans du temps pour neuf danseurs. Il a commencé à danser dans les années 1970 auprès de Susan Buirge, puis de Christine Gérard. Il a marqué le paysage chorégraphique par ses pièces denses et suspendues, dans lesquelles de grands interprètes contemporains se sont illustrés, mais aussi par son activité d’écriture, comme critique d’art et auteur de plusieurs essais sur la danse et son histoire. Or il semble que, dans sa prochaine création, l’histoire vienne explicitement investir la danse. Avec la complicité d’Alain Fleischer (films et textes), il s’agit pour Daniel Dobbels de travailler sur des images d’archives. La danse recevrait alors l’écho de ces archives, pour inventer un corps qui les prolonge, les réalise. « Quel temps pour qu’une image déploie son temps d’existence puis cède la place à celui d’une danse ? », se demande le chorégraphe. La mémoire, l’archive, le corps, dans leur précarité fondamentale, mais aussi dans leur éblouissant potentiel créatif : Daniel Dobbels nous invite, hors des fils de la chronologie et de la raison, à jouer et déjouer le temps.
Marie Chavanieux
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