Cataract Valley

« Jane Bowles n’est pas très connue en France. Il faut dire qu’elle a peu écrit : quelques nouvelles, un roman, une pièce de théâtre. On la connaît surtout comme femme de Paul Bowles, l’auteur du célèbre Un Thé au Sahara. Son rapport à l’écriture était très laborieux. Elle avait besoin de temps, jetait beaucoup de ce qu’elle créait. Ses personnages sont toujours des figures irrésolues, qui luttent entre leur part d’enfance et leur inadaptation à la réalité, aux autres. Il y a des hommes dans ses nouvelles, mais c’est dans les portraits intérieurs féminins qu’elle excelle. Ces femmes sont toujours au bord du précipice. Elle les décrit avec un humour et une sensibilité à fleur de peau.

Parole sensible

C’est dans le recueil Plaisirs paisibles que se trouve Camp Cataract, que Jane Bowles elle-même considérait comme sa nouvelle la plus aboutie. L’intrigue se passe dans un lieu comme en dehors du monde, entre sanatorium et lieu touristique, un lieu où l’on vient pour se promener près de chutes d’eau. Le chaos intérieur des personnages fait écho au grondement des cascades auprès desquelles Harriett vient pour se soigner, loin de l’amour étouffant de sa sœur Sadie. L’écriture de Jane Bowles est une écriture de la voix intérieure. Nous travaillons à le faire sentir, en jouant de la bascule entre pensée, adresse et dialogue, afin que la parole narrative s’incarne dans les personnages. »

Propos recueillis par C. R.