Bruno Gillet

Son anniversaire est passé inaperçu. L’année dernière, le compositeur Bruno
Gillet fêtait ses 70 ans loin des sirènes médiatiques. Les raisons de sa
marginalité sont sans doute à chercher autant dans son langage que dans son
parcours. Se définissant comme « autodidacte », Bruno Gillet dit
« avoir trouvé sa voie tout seul ». Ses années au Conservatoire auprès de
Nadia Boulanger lui ont simplement donné « des notions fondamentales en
harmonie et en contrepoint ». Pour pouvoir appartenir aux réseaux des
compositeurs, il valait alors mieux fréquenter la classe d’Olivier Messiaen.
« Mais j’avais en horreur son esthétique sentimentalo-religieuse », avoue
Bruno Gillet. Durant ses années d’apprentissage se détachent deux « rencontres »
capitales : la lecture de Penser la musique aujourd’hui de Boulez et la
connaissance de Gilbert Amy, avec qui il entretient toujours une réelle amitié.

Dès ses premières commandes pour la radio, Bruno Gillet manifeste un fort
attrait pour la voix et pour le rapport au texte. Il s’entoure ainsi d’écrivains
de haut vol : Italo Calvino, Georges Perec ou Florence Delay? « J’aime les
textes familiers, avec un discours simple et des mots de tous les jours ».
Son ?uvre Sicut locutus est se base ainsi sur des proverbes et des
expressions toutes faites. Mais, puisqu’« il est impossible de vivre de la
composition », Bruno Gillet mène en parallèle une carrière de pédagogue. Au
Conservatoire de Paris, il enseigne l’analyse aux élèves chanteurs, « afin de
leur faire découvrir qu’il existe d’autres époques que l’opéra romantique ! ».
Et, au Conservatoire d’art dramatique, il apprend aux jeunes acteurs quelques
rudiments de pratique vocale. Des expériences un peu décalées, à l’unisson de la
pensée musicale de ce compositeur, à la fois sérieuse et légère. Le concert
anniversaire à la Péniche proposera de parcourir les différentes facettes de son
?uvre vocale, depuis les redoutables vocalises de Solfeggio, chantées par
Salomé Haller, jusqu’aux chansons sur des textes de Robert Desnos. Dans le
spectacle Promenons-nous dans les bois, les auditeurs pourront également
entendre La punition, écrite d’après une véritable punition donnée par un
professeur de musique. Deux belles occasions de (re)découvrir l’écriture
singulière de cet électron libre de la composition.