La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Battuta

Battuta - Critique sortie Théâtre
Sur la piste de sable, défile ainsi à toute bringue une farandole de clichés empruntés au folklore gitan

Publié le 10 septembre 2007

Bartabas renoue avec la mythologie tzigane de Zingaro, pour un spectacle sémillant qui fait défiler à train d’enfer tous les clichés du folklore gitan. Du pur divertissement.

Bartabas est un grand artiste. Très grand. Lui-même d’ailleurs peine parfois à s’égaler. Tout juste sorti des fumeroles bleuies à l’encens de la mystique tibétaine qui planaient dans Loungta, le voilà qui quitte l’habit sacré de grand ordonnateur du rituel équestre et fait volte face avec Battuta pour revenir aux sources de Zingaro. Non qu’il retourne à Courbevoie sur les traces du jeune Clément Marty, identité qui fut la sienne jusqu’à ce qu’il se métamorphose en centaure. Il va plutôt fouiller dans la mythologie tzigane (« Zingaro » signifie gitan en italien) et dans les terres d’enfance pour réveiller l’insolence libertaire et l’énergie ébouriffée des premières années de la troupe fondée en 1984. Délaissant la lenteur méditative qui célébrait avec une ferveur de communiant l’harmonie de l’homme, de l’animal et de la nature, il lâche la bride de l’imaginaire qui s’en va cavaler allegro furioso et effeuille sans vergogne le catalogue raisonné des clichés du folklore gitan. Hymne à la liberté, chant à la gloire du risque et de l’incertitude, Battuta adopte donc l’allure de tous les dangers : le galop. Sur la piste de sable, défile ainsi à toute bringue une farandole de personnages bigarrés : des ménagères en fichu fleuri brinquebalées sur une roulotte, une mariée au voile immaculé suspendu dans les airs qui s’enfuit avec son bien-aimé, un patriarche grigou, des filous de grand chemin, un ours des Carpates et son dresseur, une horde de paysans armés de fourches…

Hymne à la liberté

« Un des paris de ce projet est de tenir un rythme sans cesse crescendo. » explique Bartabas. Pari réussi ! D’un côté, une fanfare de cuivres de Moldavie, plus bruyante que virtuose, et, de l’autre, un ensemble à cordes de Transylvanie, Taraf un peu pâlot, se défient et chauffent l’ambiance au rouge, encouragés par un public qui bat des mains une heure et demi durant. Voltiges, vols à l’arrachée, courses endiablées, lancers de chapkas, strip-teases loufoques et autres poursuites burlesques se succèdent à train d’enfer et débobinent le fil de la vie, de mariages en naissances, d’affrontements entre clans familiaux en enterrements. Bartabas a beau multiplier les symboles (l’oie migratrice, le désordre des ébats sexuels de l’ours et de la mariée, la fontaine de pluie aux couleurs changeantes qui coule au centre de la piste, indifférente à l’agitation forcenée alentour…), il a beau faire des clins d’œil à Tex Avery ou encore aux westerns spaghettis, ce carrousel de chromos recyclés tourne plus à vide qu’en dérision. Ou bien avouons que la subtilité du propos nous a échappé. Celui qui se revendiquait du théâtre revient ici à la succession de numéros qui rythme le cirque traditionnel. Techniquement, les acrobaties se limitent aux exercices classiques, certes d’une précision remarquable mais peu variés. Saluons toutefois l’indéniable savoir-faire et la prouesse des chassés-croisés des quelques quatre ou cinq montures et artistes. La vitesse serait-elle la seule ambition esthétique de ce spectacle ? Bartabas semble s’adonner aux plaisirs du pur divertissement. Pourquoi pas, après tout… Mais, finalement, on préférait l’époque où les chevaux étaient poètes.

Gwénola David


Battuta, conception et mise en scène de Bartabas, du 21 septembre au 31 décembre 2007.Du 21 septembre au 30 octobre, relâche les lundis, mercredis et jeudis.Du 30 octobre au 31 décembre, relâche les lundis et jeudis. Spectacle en semaine à 20h30 et à 17 h 30 les dimanches. Théâtre Zingaro 176 avenue Jean Jaurès 93300 – Aubervilliers –Métro Fort d’Aubervilliers

Réservations informations tarifs : magasins FNAC,www.fnac.com, et : 0892 681 891. Spectacle vu au Festival d’Avignon 2006.


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