30ème édition du Festival Don Quijote

Lorsqu’il crée en 1992 le festival Don Quijote, le metteur en scène Luis F. Jimenez entend pallier la faible représentation du théâtre espagnol en France. Trente ans ont passé, et de nombreux théâtres publics et privés parisiens ont accueilli dans le cadre de cet événement des spectacles hispanophones de toutes disciplines, avec une nette dominante théâtrale. Cette année, deux lieux se prêtent au jeu des compagnies programmées : l’Instituto Cervantes et le Théâtre Café de la danse. On y découvre, en version originale, quatre spectacles qui revisitent des histoires et récits du passé. Deux d’entre eux s’inspirent de textes majeurs de la littérature castillane : celui qui donne son titre au festival, Don Quichotte de Cervantes, et La Vie de Lazarillo de Tormes publié anonymement en 1556. À Don Quijote, les grandes histoires d’hier nourrissent celles du présent.

La révolution des classiques

Pour raconter les aventures picaresques du plus grand héros de la littérature espagnole, Jaume Policapo passe dans Quijote par la marionnette, l’objet, les ombres et la lumière. Roberto Hojo, lui, adopte pour aborder La Vie de Lazarillo un tout autre langage : celui du hip-hop, qu’il mêle au théâtre. Bien ancré dans notre siècle, son héros ne passe plus comme dans l’œuvre originale d’un maître à l’autre, mais d’une addiction à une autre jusqu’à trouver sa voie dans la musique. On quitte les classiques avec La batalla de los ausentes d’Eusebio Calonge, mis en scène par Paco de la Zaranda qui dirige l’une des compagnies andalouses les plus célèbres. Peuplée de survivants d’une guerre dont personne ne se souvient, cette pièce s’inspire elle aussi d’une tradition : l’esperpento, mouvement littéraire du XXème siècle. Avec Conservando memoria enfin, la compagnie El Patio Teatro nous mène en quête d’un autre héritage : celui de l’autrice Izaskun Fernández, qui à l’aide de conserves et autres objets rappelle à elle ses aïeux. L’intime, à Don Quijote, dialogue sans intermédiaires avec l’Histoire.

Anaïs Heluin