Tout Dostoïevski
Charlie Courtois-Pasteur revient ! [...]
Patrice Douchet recrée l’œuvre initialement présentée en 1998 et célèbre la voix des artistes qui traverse le temps.
C’est avec Hiroshima mon Amour que Patrice Douchet a inauguré en 1998 un cycle de créations consacrées à Marguerite Duras telles Savannah Bay, La Musica Deuxième, Moderato Cantabile ou Le Ravissement de Lol V. Stein. Le texte d’Hiroshima mon Amour incluait les dialogues du film d’Alain Resnais et les commentaires sur images écrits par Duras, et était interprété par Dominique Journet Ramel, Marie Landais et Gilles Dao. En 2008 survint la disparition tragique de Marie Landais et Gilles Dao. En 2012, le metteur en scène a décidé en concertation avec la comédienne Dominique Journet Ramel, qui a participé à plusieurs de ses oeuvres, de faire à nouveau et différemment entendre cette partition envoûtante. Hommage au texte d’une limpidité et d’une concision sidérantes et hommage au splendide film d’Alain Resnais, qui nous a récemment quittés, cette recréation ravive aussi le souvenir de l’œuvre initiale et de ceux qui l’ont portée. Dans une perspective durassienne, la pièce entrelace ainsi plusieurs mémoires, et se joue sur le fil entre l’intime et sa restitution publique, celui des personnages qui se confient, s’abandonnent à l’amour et se heurtent à la cruauté terrible de l’Histoire, celui des artistes liés à jamais à la première mise en scène et à ses émotions. Cette nouvelle proposition utilise un document sonore de 1997 avec la voix des trois acteurs, et le jeu de la comédienne comme la scénographie célèbrent la voix des artistes et la voix durassienne qui traversent le temps.
Nécessité de la mémoire
Avec sobriété et ténacité, l’œuvre se déploie contre l’oubli et pour l’évidente nécessité de la mémoire. L’horreur de la bombe atomique – deux cent mille morts en neuf secondes -, la fulgurance de l’histoire d’amour entre la Française et le Japonais, l’intensité et le surgissement de l’amour d’antan à Nevers avec un soldat allemand, qui lui valut l’opprobre et l’humiliation, le fil relié à la précédente mise en scène : diverses strates de souvenirs et de paroles se superposent et s’entremêlent, n’évitant pas parfois une certaine confusion ou dilution. Peut-être aussi parce que la multiplicité des histoires et des personnages, le télescopage entre histoires et Histoire, demeurent au début trop uniformes et désincarnés. Comme si le commentaire primait sur le vécu, sur la subjectivité. Mais au fil de la représentation, grâce au travail minutieux et soigné du metteur en scène et au jeu sensible et nuancé de Dominique Journet Ramel, la pièce se structure, se resserre, et gagne en intensité. C’est une œuvre délicate à recommander en cette année du centenaire de la naissance de l’écrivain.
Agnès Santi
Du 5 mars au 26 avril, du mardi au samedi à 18h30. Tél : 01 45 44 57 34. Durée : 1h10.
Charlie Courtois-Pasteur revient ! [...]