Du baroque vivant ! Béatrice Massin poursuit sa route, à la croisée de la recherche et de la création. Un Air de Folies est sa dernière pièce, et convoque musique et danse dans une joyeuse rencontre.
Sur scène, quelques instruments : basse de viole, théorbe, clavecin… Des lumières douces, bougies, chandeliers… Pas d’artifices, pas de débordements, mais une atmosphère intime propice à la rencontre. Béatrice Massin a construit sa pièce sur un étonnant assemblage de musiques : des airs de cour du XVIIème siècle, conjugués aux Folies d’Espagne de Marin Marais, beaucoup plus graves. Même si la chorégraphe a puisé sa matière chorégraphique dans les notations qui subsistent de l’époque (danse à trois temps lents, utilisant des pas glissés et virtuoses, par Feuillet), elle a dû compléter les variations des jambes par une recherche autour de l’ornementation des bras et de la mobilité des mains et des doigts. Un travail de précision que l’on ne devine pas, tant les évolutions des danseurs, leur aisance et leur relâchement, occultent la partie technique. Les danseurs sont à l’aise, détendus, dans cette pièce qui mise beaucoup sur leurs relations. Sobrement vêtus de corsets et pantalons larges pour les dames, pantalons de ville et chemises pour les messieurs, ils éliminent d’emblée toute tentative de lecture historique qui ferait de la pièce une reconstitution des éléments du passé.
Encore un autre visage de la danse baroque
Car un Air de Folies, même s’il s’appuie sur l’Histoire, n’a rien d’un spectacle poussiéreux. Il célèbre la danse et la musique baroques grâce à un audacieux mélange des genres et l’adhésion complète des danseurs : le sérieux des postures du corps et des développements géométriques du mouvement se télescope avec la franche paillardise des chansons du baryton. Philippe Cantor, qui dans une précédente pièce (Un Voyage d’Hiver), cassait de son imposante présence les possibilités de la danse, trouve ici manière subtile et désarmante de chanter au cœur de la danse. On débouche une bouteille, des complicités naissent, chacun est libre de partir dans une farandole ou de se laisser emporter dans un solo très posé. Cette communauté d’individus s’épanouit au fil du spectacle et des chansons à boire, égrenées par surprise et par petites touches. On s’amuse de ces débordements coquins, et la fête finale constitue une belle ode à la liberté de penser et de se mouvoir. Le spectateur, rendu complice de ces excès, victime d’empathie vis-à-vis de la danse, est emporté dans ces Folies presque malgré lui.
Spectacle vu au Théâtre de Chartres.
Un Air de Folies de Béatrice Massin, le 7 novembre à 20h30 au Centre des Bords de Marne, 2 rue de la Prairie, 94170 Le Perreux-sur-Marne. Tel : 01 43 24 54 28. Et le 13 novembre à 20h30 à l’Espace Culturel André Malraux, 2 place Victor Hugo, 94270 Le Kremlin-Bicêtre. Tel : 01 49 69 69 42. Le samedi 15 novembre à 20h30 au Pôle Culturel d’Alfortville, Parvis des arts. Tél : 01 58 73 29 18.