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Stéphane Schoukroun et Jana Klein de la compagnie (S)-Vrai tentent de faire œuvre théâtrale de leur expérience d’intervenants en milieux scolaires, dont ils cherchent à dire les complexités et les mutations. Leur approche autofictionnelle du sujet fait hélas largement écran à celui-ci.
En ouvrant Notre École (tragi-comédie) sur la voix bien reconnaissable d’une Intelligence Artificielle (IA) qui nous présente leur parcours et leur démarche artistique, Stéphane Schoukroun et Jana Klein placent cette nouvelle création dans la continuité de Notre histoire (2021), où ils faisaient déjà de leur couple le sujet d’une autofiction théâtrale. Dans ce précédent spectacle, le couple à la vie et à la scène, qui co-dirige la compagnie (S)-Vrai, faisait appel à l’IA pour tenter de trouver des réponses aux questions complexes que lui pose son identité mixte – Stéphane Schoukroun est Juif, Jana Klein Allemande – face aux violences de l’époque. D’un spectacle à l’autre, l’IA change de statut et perd beaucoup de son sens : d’accessoire très clairement absurde, il devient ici une sorte de regard extérieur d’une autofiction dont Stéphane et Jana sont les anti-héros. Sa fonction par rapport aux nombreuses autres strates de Notre école n’est guère évidente : est-elle là pour critiquer l’entreprise théâtrale du duo et/ou la démarche théâtrale en milieu scolaire qu’il mène depuis vingt ans en parallèle de ses créations ? Symbolise-t-elle plutôt la déroute de l’humanité face à une forme d’intelligence qu’elle a créée mais qui semble presque pouvoir bientôt se passer d’elle ? Ce n’est là que la première des ambiguïtés de la pièce qui, à force de multiplier les pistes de récit, de se jouer du vrai et du faux, perd largement de vue le sujet qu’elle prétendait traiter : le rôle de l’art dans un milieu scolaire qui, à l’image de l’ensemble du service public français et donc du théâtre, souffre des amples coupes qui lui sont faites.
L’école comme à la maison
Pour se lancer dans une série de reconstitutions d’expériences en milieux scolaires avec les moyens du bord théâtral, (S)-Vrai a recours à un prétexte qui aurait gagné à être présenté comme tel plutôt que comme un moteur de récit sérieux. Un jour, raconte le couple dans une adresse directe au public qui est l’une de ses marques de fabrique, Stéphane Schoukroun n’a pas réussi à entrer dans l’établissement scolaire où il donnait ce que l’on appelle une « action culturelle ». Perte de sens totale. Angoisse face à des élèves qui, dit-il, rejettent de plus en plus souvent ce que leur proposent les adultes. Accompagnés sur scène des jeunes comédiens Ada Harb et Baptiste Febvre, qui mènent régulièrement avec eux des interventions en écoles, ainsi que du créateur sonore et musical Pierre Fruchard et du régisseur de plateau Wilfried Roche – eux aussi collaborateurs de longue date de la compagnie –, les deux directeurs de (S)-Vrai bricolent afin de donner forme à leurs souvenirs. Quelques scotchs colorés, deux chaises d’école, un tableau noir et une bonne collection d’écrans aident les artistes dans l’évocation de trois aventures artistico-pédagogiques précises, donnant lieu à des chapitres qui prétendent suivre la chronologie de la scolarité : primaire, collège, lycée. Les allers-retours constants entre présent théâtral et passé scolaire, régulièrement visités par l’IA et par la vie privée de Stéphane et Jana, surtout au titre de parents d’une enfant dont la scolarité les inquiète, mettent ces derniers au premier plan de l’enquête. Si professeurs et élèves apparaissent dans Notre école, c’est en effet davantage comme des figures que comme des personnalités complexes. Les questions essentielles de la place de l’art à l’école et dans la société ne peuvent ainsi être réellement traitées, d’autant que les protagonistes centraux ne sortent qu’en toute fin, dans une forme de pirouette, de leur rôle d’intervenants paumés.
Anaïs Heluin
à 18h, le dimanche 9 à 16h, du 11 au 13 à 20h. Tél : 01 43 90 49 49. Durée :1h30. Spectacle vu le 16 janvier au Beffroi à Montrouge.
Également le 13 mars au Théâtre du Fil de l’eau à Pantin (93).
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