La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2022 - Entretien / Arnaud Anckaert

Si je te mens, tu m’aimes ? de Robert Alan Evans et Together de Dennis Kelly, deux pièces britanniques mises en scène par Arnaud Anckaert

Si je te mens, tu m’aimes ? de Robert Alan Evans et  Together de Dennis Kelly, deux pièces britanniques mises en scène par Arnaud Anckaert - Critique sortie Avignon / 2022 Avignon Avignon Off. La Manufacture
DR / Arnaud Anckaert

Avignon Off / La Manufacture / textes de Robert Alan Evans et Dennis Kelly

Publié le 26 juin 2022 - N° 301

Familier d’Avignon Off où ils ont présenté en 2019 Séisme et Toutes les choses géniales* de Duncan Macmillan, Arnaud Anckaert et la compagnie du Prisme reviennent à  La Manufacture avec deux pièces d’auteurs britanniques, Si je te mens, tu m’aimes ?, une commande d’écriture à Robert Alan Evans, et Together, création française d’un texte de Dennis Kelly.

En quoi ces deux pièces s’appuient-elles sur le réel ?  

Arnaud Anckaert : Les deux spectacles ont un lien avec le réel mais sont très différents. Le fil qui les relie c’est le rapport que nous entretenons avec le monde, et comment nous nous emparons de ce qui nous arrive pour nous penser comme êtres humains. On pourrait dire que la question de la responsabilité est au cœur de ce diptyque et aussi l’amour ! Si je te mens, tu m’aimes ? est basé sur un évènement qui s’est passé dans l’école de mes enfants, qui interroge le rapport parent enfant. Together prend racine dans le contexte de la pandémie, et raconte l’histoire d’un couple confiné avec leur enfant. Dans les deux textes, il y a cette question de la vérité : qu’est-ce qui est vrai dans ce monde et entre nous ? Les deux textes ont été écrits pendant la pandémie. Ce sont des écritures traversées par les inquiétudes d’aujourd’hui mais avec une direction humaniste, empreinte d’humour.

« Dans les deux textes, il y a cette question de la vérité : qu’est-ce qui est vrai dans ce monde et entre nous ? »

Huis clos d’un couple, Together a-t-il des résonances avec l’œuvre d’Ingmar Bergman ? En quoi est-il différent de cette veine ?

A.A. : Together est une création spontanée et volontariste de ma part, j’avais envie de tenter une expérience rapidement, de mettre en miroir ce que nous venons de vivre avec cette pandémie et de pouvoir le faire au théâtre. À l’époque du confinement, j’avais écrit à Dennis pour savoir s’il écrivait quelque chose, étant donné le contexte, il m’avait répondu : « pas pour le moment ». Puis est venu de façon soudaine Together, c’est devenu un film qu’a réalisé Stefen Daldry, et j’ai eu envie de le faire au théâtre car à l’origine ça devait être une pièce de théâtre … Together n’a rien à voir avec Bergman, simplement dès qu’il y a une intense histoire de couple, on ne peut pas ne pas y penser. Together est caractéristique de l’écriture de Dennis Kelly, il mélange les genres, on rit, on a peur et on pense ensemble. J’attends du théâtre aujourd’hui qu’il nous confronte à ce que nous sommes, et cela de la façon la plus honnête possible. Le texte de Dennis, qu’interprètent Noémie Gantier et Maxime Guyon, est plus politique qu’il n’y paraît.

La pièce Si je te mens, tu m’aimes ? dresse-t-elle un portrait familial ordinaire ? Quels types de relations entre adultes et enfants la pièce éclaire-t-elle ?

A.A. : La pièce de Robert Alan Evans est une pièce familiale. Il y a un portrait de deux familles, socialement différentes. Les enfants se rencontrent, ça fait des étincelles, et les parents ne sont pas au rendez-vous. C’est  une histoire qui nous interroge sur ce que sont les histoires. Dans les cours de récréation et partout ailleurs, nous vivons dans une société où les fictions sont très présentes. Difficile de distinguer le vrai du faux, la justice de l’arbitraire. Ce qui m’a intéressé dans la collaboration que nous avons eue avec Rob, c’est qu’il a écrit à partir de ce que je lui ai raconté, et créé des personnages totalement imaginaires. Il a une faculté géniale à explorer  les turbulences du monde de l’enfant, ses peurs et ses besoins. Les acteurs prennent en charge tous les personnages, c’est très ludique et passionnant théâtralement.

Quelles caractéristiques aimez-vous dans le théâtre anglophone d’aujourd’hui ?  

A.A. : Lorsque j’ai découvert, fait traduire et monté Orphelins de Dennis il y a 10 ans, je ne savais pas à l’époque que j’allais me passionner pour le théâtre anglo-saxon. Puis j’ai déroulé un fil en faisant connaître pour la première fois en France des auteurs et autrices anglais quasi inconnus à l’époque, et qui sont aujourd’hui très repérés dans le monde. Duncan Macmilllan, Alice Birch, Dennis Kelly, Robert Alan Evans, Nick Payne et la saison prochaine Sam Holcroft avec Rules for Living ou les règles du je(u) qui fera une belle première tournée. Ce sont des dramaturges exigeants et généreux, tous très talentueux et singuliers. J’ai plaisir à travailler avec les acteurs sur leurs textes. J’ai l’impression que l’Angleterre est la machine à écrire du monde globalisé. Quoiqu’en pensent certains, ils créent des dramaturgies incroyables depuis au moins Shakespeare !

Propos recueillis par Agnès Santi

*Lire notre critique La Terrasse n° 281, novembre 2019

A propos de l'événement

Si je te mens, tu m’aimes ? et Together
du jeudi 7 juillet 2022 au mardi 26 juillet 2022
Avignon Off. La Manufacture
2 rue des écoles 84000 Avignon

Together, les 8, 10, 12, 15, 17 19, 22, 24 et 26 juillet à 10h25.

Si je te mens, tu m’aimes ?,  les 07, 09, 11, 14, 16, 18, 21, 23, 25 Juillet à 10h25.

Tél. : 04 90 85 12 71.

lamanufacture.org

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