« Venise, récit chanté d’un corps », Fanny Chériaux raconte l’épopée pop de son corps, accompagnée par Nicolas Bonneau à la mise en scène
Fanny Chériaux, venue au festival en 2022 [...]
Fida Mohissen et Rami Rkab, précisément et élégamment dirigés par François Cervantes, interprètent une bouleversante traversée existentielle. Sidérant d’intelligence, de bonté et de force. Immanquable !
La confession est à la mode et les tranches de vie qu’assène aujourd’hui le théâtre sombrent souvent dans le sentimentalisme narcissique, comme si les souffrances méritaient toutes d’être bramées, au prétexte de soigner ceux qui les racontent. Le témoignage n’a d’intérêt que lorsque le baume est appliqué sur les plaies de ceux qui l’écoutent. Ils sortent ainsi grandis d’avoir entendu ce qu’un de leurs semblables avoue sans s’héroïser, parlant de tous en le faisant de lui-même. Voilà exactement ce que réussit Fida Mohissen avec Shahada. On croirait entendre Rousseau s’adressant à son juge : « Être éternel, rassemble autour de moi l’innombrable foule de mes semblables ; qu’ils écoutent mes confessions, qu’ils gémissent de mes indignités, qu’ils rougissent de mes misères. Que chacun d’eux découvre à son tour son cœur au pied de ton trône avec la même sincérité, et puis qu’un seul te dise, s’il l’ose : je fus meilleur que cet homme-là. »
Que l’amour soit, et la lumière fut !
Un homme avance dans la lumière. Il vient pour parler à la communauté assemblée des hommes (que l’on appelle un théâtre). Il présente un humain « dans toute la vérité de sa nature » aurait dit le citoyen de Genève, même si Fida Mohissen a passé son adolescence en Syrie, sous la tutelle d’un autre dieu que celui du vicaire savoyard. Se confrontant à sa jeunesse exaltée et radicale, incarnée par l’intense et vibrant Rami Rkab, Fida Mohissen expose, sans les fioritures poseuses ni les affèteries de la belle âme, le parcours de l’asservissement haineux à l’amour serein. Le propos est d’une simplicité lumineuse, d’une force éblouissante, d’une humilité rare, d’une intelligence et d’une sincérité époustouflantes. Le spectacle raconte le passage d’Orient en Occident, le temps qui passe et qui dément l’intégrité identitaire (que seuls les intégristes croient immuable), mais surtout la victoire de l’autonomie sur la soumission. On a l’impression de voir une âme se déployer « comme dans ce jeu où les Japonais s’amusent à tremper dans un bol de porcelaine rempli d’eau de petits morceaux de papier jusque-là indistincts qui, à peine y sont-ils plongés s’étirent, se contournent, se colorent, se différencient, deviennent des fleurs, des maisons, des personnages consistants et reconnaissables ». Ce ne sont pas les nymphéas de la Vivonne ou l’église de Combray qui surgissent alors, mais une mosquée, un restaurant, des cours de théologie et de théâtre, les rues d’Avignon, de Paris et de Damas. La littérature et le théâtre offrent à celui qui le sert de devenir l’homme qu’il a choisi d’être, même si la révélation ne va pas sans heurts et sans douleurs. Il n’est pas de plus grand combat que celui mené contre soi-même. Fida Mohissen l’illustre de manière éclatante, retrouvant, à la fin, la mer allée avec le soleil dans l’évidence bouleversante du poème et de la fraternité.
Catherine Robert
à 18h45, relâches les 8 et 15. Tel : 04 84 51 20 10. Spectacle vu au 11 · Avignon en 2023. Durée : 1h05.
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