Philippe Adrien
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Jacques Vergès se met en scène en avocat esthète et humaniste.
Et donc, que « la profession d’avocat n’est pas seulement l’exercice d’une technique, c’est aussi et avant tout une manière d’assumer l’humanité de tous les hommes, coupables ou non. » Maniant subtilement la rhétorique aux accents camusiens (« Dans tout coupable, il y a une part d’innocence » écrivait Camus à son ami Jean Grenier), Jacques Vergès se peint en esthète humaniste, lion solitaire parmi les dindons, défenseur acharné des opprimés comme des monstres, à rebours de ses confrères, « alpinistes de l’ascension sociale ». Et dans l’envol improvisé d’une réplique se compare au curé de campagne de Bernanos. Le portrait est flatteur, cachant sous ces belles couleurs les autres faces du personnage, les ambiguïtés d’un homme révolté, agitateur arrogant et farouche militant anticolonialiste, qui parut souvent dériver vers l’antisionisme et prendre fait et cause pour les pires tortionnaires et pour le terrorisme. Serait-ce là une réponse au tableau contrasté de L’Avocat de la terreur (2007), film documentaire de Barbet Schroeder, devenu depuis lors son « cher ennemi » ? L’inventeur du concept de « défense de rupture » n’a plus à démontrer en tout cas son expert maniement de la tactique de diversion par médias interposés. Sur le plateau, il semble pourtant se présenter sans fard. Serial plaideur relèverait ainsi plus de la conférence que du théâtre en dépit de quelques malheureuses tentatives de mise en scène. Ordonnateur méticuleux de sa propre « légende », il prend la pose du dandy baudelairien sauveur des âmes perdues. Là est peut-être la représentation…
Gwénola David
Serial plaideur, de et avec Jacques Vergès, adaptation Louis-Charles Sirjacq, jusqu’au 29 décembre 2008, le dimanche à 18h et 21h, le lundi à 21h, au Théâtre de la Madeleine, 19 rue de Surène, 75008 Paris. Rens. 01 42 65 06 28 et www.theatredelamadeleine.com. Durée : 1h40.
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