La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Cirque - Critique

Raphaëlle Boitel reprend « Ombres portées », une œuvre puissante

Raphaëlle Boitel reprend « Ombres portées », une œuvre puissante - Critique sortie Cirque Paris _THEATRE SILVIA MONFORT
Mohamed Rarhib dans Ombres portées de la cie L’Oubliée © C. Raynaud de Lage

Critique
Reprise / Théâtre Silvia Monfort / Mise en piste Raphaëlle Boitel

Publié le 29 octobre 2024 - N° 326

Avec Ombres portées, Raphaëlle Boitel signe une œuvre puissante. Dans l’espace sculpté par les lumières de Tristan Baudoin, les interprètes, murés dans le silence, expriment par leur corps le secret familial qui les ronge. Une vision cinématographique, des mouvements millimétrés, une histoire vénéneuse : Ombres portées est un spectacle maîtrisé, à la croisée des disciplines.

Cela commence dans la violence. Au-dessus du plateau, Vassiliki Rossillion se balance sur une corde volante. En projetant une rage impressionnante, elle nous fait comprendre la déchirure impensable qui a fait basculer la vie de son personnage dans un enfer qui ne dit pas son nom. Noir. On découvre la famille : le frère, les sœurs, le futur beau-frère un peu coincé. Et le père, massif, muet, noyé dans les ombres, l’objet de toute la colère de sa fille. Un crime a eu lieu que tout le monde s’arrange pour ne pas conscientiser, alors qu’il ravage la famille et obère l’avenir. Les Ombres portées, ce sont celles des non-dits, qui projettent leur obscurité sur la vie de tout le monde. Raphaëlle Boitel prend de front un thème sombre, et n’escamote rien de ce qui le rend terrifiant, tout en esquissant, peut-être, des voies vers la réparation.

Une puissante chorégraphie de cirque

Les Ombres portées, ce sont aussi celles des éclairages extraordinairement travaillés qui déchirent l’espace de rais fulgurants qui laissent le reste dans le noir. Tous les personnages sont ballotés entre l’obscurité qui les engloutit ou la lumière qui les frappe avec une telle force qu’ils en sont renversés. Au-delà de cette métaphore, la bande-son rock diffusée en son spatialisé, la façon très nerveuse de découper le spectacle par séquences, de construire des tableaux chargés de sens, rappellent que Raphaëlle Boitel met en scène comme d’autres réalisent des films. Les interprètes sont impeccables, les corps traduisent le conflit intérieur, la culpabilité qui les secouent. C’est un spectacle fort, exigeant, qui ne laisse pas indifférent.

Mathieu Dochtermann

A propos de l'événement

Ombres portées
du mardi 5 novembre 2024 au samedi 23 novembre 2024
_THEATRE SILVIA MONFORT
Parc Georges Brassens, 106 rue Brancion, 75015 Paris

du mardi au vendredi à 19h30, samedi à 18h. Tél. : 01 56 08 33 88. Durée : 1h10.

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