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Danse - Critique

Questcequetudeviens ?

Questcequetudeviens ? - Critique sortie Danse
Légende photo (crédit Mario del Curto) : Stéphanie Fuster en pleine effusion sous la direction d’Aurélien Bory

Publié le 10 octobre 2009

Sous cette question, la forme solo d’une danseuse de flamenco mise en scène par un artiste touche-à-tout. Une rencontre au sommet entre les deux enfants de Toulouse, Aurélien Bory et Stéphanie Fuster.

C’est à Séville pendant huit ans que Stéphanie Fuster est devenue danseuse flamenca. Une échappée belle qui lui vaudra d’être interprète auprès de grands artistes, tels Israel Galvan. Un parcours étonnant pour une jeune française, qu’Aurélien Bory a pris à bras-le-corps pour écrire ce spectacle, taillé sur-mesure pour la danseuse, et broyant bien des attentes sur ce que doit être une danseuse de flamenco. Une scénographie tout en cubes morcelle l’espace en trois parties bien distinctes. La danseuse, toute de rouge et de froufrous vêtue – comme il se doit ? – s’avance d’abord timidement vers le plateau central. Elle prend la scène en toute simplicité, esquissant quelques pas, prenant la pause comme une petite fille qui jouerait grossièrement au flamenco. Pas de frappes de mains ou de pieds, mais une ritournelle, un chant qu’elle donne en lieu et place des rythmes habituels. Ce premier tableau a le goût de l’enfance, de la magie, comme lorsque la robe prend vie, dégouline du corps de Stéphanie, le cache ou se dérobe avec facétie. Le spectacle enchaîne sur une deuxième séquence, confinée dans l’espace d’une petite pièce reconstituée sur le plateau : un studio de danse, peut-être, où danseuse et musiciens viennent répéter leurs morceaux. C’est bien là une danseuse flamenca à l’entraînement que l’on découvre, travaillant la naissance de son geste et son adéquation avec la musique.

Intimité vs effusion

Belle idée que cette parenthèse dans les coulisses de la création, prétexte également à quelques surprises scénographiques. Stéphanie, dans un zapateado acharné, montre toutefois la solitude de la danseuse face à son miroir. Elle nous raconte le prix de la sueur, qui vient petit à petit embuer la vitre qui nous sépare de son intimité. Plus elle travaille son geste, moins on la voit. La danseuse s’efface enfin derrière l’opacité, ne laissant que la trace de son corps comme geste ultime. Le spectacle, bien que sobre, présente une montée en puissance des effets scénographiques, jusqu’à la mise en eau de la scène centrale. Là, le flamenco prend un corps plus spectaculaire, plus recherché, donnant à chaque frappe de pieds un son, et une résonnance particulière : les gouttes fusent dans tous les sens, les traversées sont raides, le corps incisif, l’eau devient miroir, la danseuse se noie dans son martèlement… Cette effusion montre pourtant vite ses limites : bien que la plus visuelle et la plus insolite, cette séquence reste la moins aboutie du point de vue du sens, et l’on préfèrera la face plus intime que nous présentait Stéphanie par ailleurs.

Nathalie Yokel


Questcequetudeviens ? d’Aurélien Bory jusqu’au 24 octobre, du mercredi au samedi à 20h30, le dimanche à 15h30 (relâche lundi et mardi), au Théâtre Nanterre-Amandiers, 7 avenue Pablo Picasso, 92022 Nanterre. Tel : 01 46 14 70 00.

A propos de l'événement


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