La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Play House

Play House - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de Belleville
Myrtille Bordier et Tom Politano dans Play House. Crédit photo : Axel Coeuret

Théâtre de Belleville / de Martin Crimp / mes Rémy Barché

Publié le 10 mai 2015 - N° 232

Rémy Barché explore au scalpel le délitement de la vie conjugale que décrit l’implacable Martin Crimp. Myrtille Bordier et Tom Politano interprètent avec talent deux tourtereaux aux nerfs à vif.

Il n’y a pas loin du Capitole à la roche Tarpéienne et il n’y a qu’un spasme de l’extase à la tristesse. Du pull en mohair rose à la perruque fuchsia, Katrina passe de la niaiserie roucoulante aux promesses d’une sexualité remotivée par la participation de la voisine aux ébats avec son gentil mari, devenu esclave soumis, la cravate transformée en laisse… Mais le ver était dans le fruit, et lorsque Simon lèche la table basse au moment d’emménager dans le nid douillet, on devine aisément que les digues qui protègent le bonheur sucré sont prêtes à rompre. Rémy Barché organise la mise en scène de Play House avec un art consommé du suspense. Les indices sont légion, on voudrait bien n’y pas croire, mais l’évidence s’impose progressivement : ça va péter entre Barbie et Ken… La pièce de Martin Crimp est composée de treize courtes scènes, que les comédiens interprètent tambour battant. Pas de pause : la catastrophe se fait destin, ses interprètes en sont les victimes.

Du rire au rictus

Play House signifie, en anglais « maison de jeu », « théâtre » et « jouer au papa et à la maman », remarque Rémy Barché, qui appuie sa mise en scène sur cette polysémie. La voix de Paulette Wright annonce les scènes comme autant de consignes de jeu, et Myrtille Bordier et Tom Politano s’exécutent, comme des pantins manipulés par un marionnettiste pervers. La scène théâtrale se confond avec la scène conjugale. Les amants sont dépassés par ce qui les meut : la convention sociale, les affects, leur passé, et leurs deux névroses qui, ainsi réunies, fabriquent une délirante machine à souffrir. Le rythme effréné du spectacle constitue une gageure que les deux comédiens relèvent haut la main, passant allègrement d’une scène à l’autre, changeant d’humeur aussi vite que de costume, et dévastant le biotope amoureux comme deux rats de laboratoire rendus fous par l’exiguïté imposée. Sous le masque désopilant de ce qui semble au début une incisive comédie de mœurs, apparaît le visage terrifiant de la tragédie et le rictus sardonique d’un pessimisme existentiel qui convainc avec brio qu’il n’y a pas d’amour heureux !

 

Catherine Robert

A propos de l'événement

Play House
du samedi 11 avril 2015 au vendredi 26 juin 2015
Théâtre de Belleville
94 Rue du Faubourg du Temple, 75011 Paris, France

Du mardi au samedi à 19h30 ; dimanche à 20h30. Relâches les 7, 8, 9, 19, 20, 21 mai et le 13 juin. Tél. : 01 48 06 72 34. Durée : 50 min.

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