Les Intrépides – Dialogue(s) par Léna Bréban
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Festival d'Aix-en-Provence-Opéra-Critique
Quatrième opéra de George Benjamin, et deuxième à être créé au Festival d’Aix-en-Provence après Written on Skin en 2012, Picture a day like this revient au format chambriste du premier opus lyrique du compositeur britannique, Into the Little Hill, avec le même duo à la mise en scène, Daniel Jeanneteau et Marie-Christine Soma. Le raffinement des couleurs musicales et l’alchimie avec les mots de Martin Crimp sont magnétisés par l’incarnation de Marianne Crebassa.
Les furtifs effets d’anamorphose des personnages et de leurs ombres, façonnés par les reflets métalliques aseptisés de morgue sur lesquels se lève le rideau, modulent, comme le trouble d’un réglage optique, un seuil à la plongée mentale et onirique dans le cheminement initiatique de la parabole que Martin Crimp a métabolisée à partir de sources immémoriales. Une Femme a perdu son enfant ; elle le retrouvera vivant si elle obtient un bouton de la manche d’une personne heureuse. Le couple d’amants, l’Artisan, le Compositrice, le Collectionneur, et même Zabelle : de cette quête décevante surgira une certaine sagesse. Daniel Jeanneteau et Marie-Christine Soma ont conçu pour ce voyage intérieur une scénographie fluide où translatent les étapes successives de son itinéraire. La création du jardin enchanté de Zabelle fait appel aux expérimentations chimiques et vidéographiques d’Hicham Berrada, recréant une effervescence botanique et marine à partir de substances toxiques, dans un paradoxe au diapason de cet éden trompeur. L’apparente simplicité linéaire et illustrative de la dramaturgie et de la scénographie, néanmoins évocatrice à l’exemple des coulisses de cimaises pour l’épisode avec le collectionneur, permet une convergence vers la véritable sève de ce quatrième opéra de George Benjamin, la quintessence de ses alchimies de textures et de couleurs.
Une réussite miraculeuse
Après les vastes opéras de Written on skin et Lessons in Love and Violence, le retour à une formation chambriste approfondit le raffinement désormais reconnaissable de son imagination orchestrale et la naturalité de son écriture vocale qui magnifient les mots de Martin Crimp, son complice depuis ses débuts dans le genre lyrique. Sous la baguette du compositeur, les pupitres du Mahler Chamber Orchestra font rayonner toutes les subtilités d’une partition où la maîtrise des moyens rejoint la pureté de l’émotion. Dans le rôle clef de la Femme, Marianne Crebassa déploie toute la palette d’un chant au plus près de l’inflexion des sentiments, sur toute l’étendue de sa tessiture de mezzo, jusque dans les murmures des graves. Constamment en scène pendant toute la durée de l’ouvrage, elle s’en fait, avec intelligence, le pivot narratif et introspectif. Dans le couple des amants, et de la compositrice et son assistant, la soprano Beate Mordal et le contre-ténor Cameron Shahbazi révèlent la même complémentarité. De la robustesse du baryton John Brancy affleure la vulnérabilité de l’Artisan et du Collectionneur. Quant à Anna Prohaska, sa Zabelle palpite de tension expressive. Dans l’écrin intimiste du Théâtre du Jeu de Paume, Picture a day like this résonne comme un nouveau miracle de l’opéra contemporain.
Gilles Charlassier
, à 20 heures, les 8, 14, 15, 22 et 23 juillet à 17 heures. Durée : 1h05. Tél : 08 20 67 00 57.
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