La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Nous avons les machines

Nous avons les machines - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre du Rond-Point
Des Chiens de Navarre orgiaques et cannibales. CR : Philippe Lebruman

Théâtre du Rond-Point / par Les Chiens de Navarre / mes de Jean-Christophe Meurisse

Publié le 8 février 2014 - N° 217

Il n’a pas encore dix ans mais se paye déjà un festival : le collectif des Chiens de Navarre présente un collector de trois pièces, un mois durant au Rond-Point, parmi lesquelles la très réussie Nous avons les machines.

A partir du 5 février, ce sera Une Raclette. Puis, à compter du 8, Regarde le lustre et articule. Pas de prédilection esthétique à ne vous présenter que Nous avons les machines, programmé à partir du 19, mais le simple effet d’une connaissance encore lacunaire du travail des Chiens de Navarre. Ces derniers se sont constitués en collectif en 2005, venus d’horizons divers. Ils ont décidé alors de faire du théâtre à leur manière : des textes qui se construisent au plateau, lors des répétitions, un format récurrent de pièces à la table, un mélange d’humour carabin et d’esthétique référencée, des spectacles qui peuvent paraître foutraques, provocants ou gratuits, qui détonnent dans le paysage théâtral, portent gravité et noirceur, critique sociale et sentiment quasi métaphysique de l’homme si petit, tellement rien, et en tout cas beaucoup moins qu’il ne croit. Ainsi, à poil et masqués, les Chiens accueillent les spectateurs de Nous avons les machines à coups de quolibets et autres vannes improvisées. Le ton est donné : ici, on renverse les valeurs, c’est le haut qui grimace – l’intellect, le masque social – et le bas – la pulsion – qui se libère joyeusement.

L’improvisation mord sans cesse les mollets de la partition

La suite est presque irracontable. Elle débute par une réunion de travail dans une collectivité locale, entre culturel et sociocu, où la mièvrerie des intervenants exhibe la violence contenue des rapports sociaux, se prolonge avec la mise à mort d’une chaise, le survol d’un drone d’hélicoptère, puis se répète en version futuriste, zombies verts et visioconférence intersidérale, et explose enfin en une orgie cannibale d’une fulgurante force poétique. Foutraque, on vous l’avait dit. Mais aussi porté par le jeu si particulier de la troupe, où l’improvisation mord sans cesse les mollets de la partition, avec aux manettes Jean-Christophe Meurisse, qui du haut de la régie, tente d’adapter le rythme. C’est Une Raclette qui les avait révélés au premier plan. Regarde le lustre et articule compte un invité différent chaque soir pour la « lecture performée d’une pièce de théâtre contemporain non-écrite ».Pour compléter la connaissance de leur répertoire ou découvrir la compagnie cynique et mordante, ce sont donc trois gamelles au goût relevé qui se présentent sous nos babines, où les Chiens plantent leurs crocs acérés, dans un théâtre à la recherche incessante de son équilibre, soit en perpétuel déséquilibre, ce qui reste – ils l’ont compris – la seule manière d’avancer.

Eric Demey

A propos de l'événement

Nous avons les machines
du mercredi 19 février 2014 au dimanche 2 mars 2014
Théâtre du Rond-Point
2bis Avenue Franklin Delano Roosevelt, 75008 Paris.

Du 19 février au 2 mars à 21h, dimanche à, 18h30. Relâche le 24 février. Tél : 01 44 95 98 21. Durée : 1h20. Spectacle vu au Théâtre de Gennevillers (T2G).

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