Le cinéaste israélien Amos Gitaï présente House à La Colline
Le cinéaste israélien Amos Gitaï adapte au [...]
Miracle de théâtre et d’émotion sur la scène du Petit Saint-Martin ! Marie-Julie Baup et Thierry Lopez interprètent la pièce qu’ils ont adaptée de celle de Matthew Seager. Bouleversant ! À ne pas manquer !
Jeanne et Arthur s’aiment comme on s’aime quand on est jeune et beau et que tout va bien. Ils sont drôles et spirituels, et leur univers rose bonbon (couleur que la scénographie monochrome de Bastien Forestier exploite de manière cocasse et amusante) symbolise le bonheur serein dans lequel ils vivent. Les premières scènes de la pièce, qui racontent leur rencontre, sont pétillantes et les rendent d’emblée particulièrement attachants. Jeanne et Arthur sont tellement aimables qu’on prend un plaisir infini à voir naître leur amour. On se demande même où va mener cette histoire sans histoires… Mais la tragédie est tapie dans les interstices du récit, comme une bête méchante, et elle frappe bientôt avec cruauté, d’autant que ses victimes ne l’ont pas vu venir. Petit à petit, Arthur perd ses mots et la maladie d’Alzheimer lui grignote le cerveau. Marie-Julie Baup et Thierry Lopez ont choisi d’adapter la pièce originale de Matthew Seager en auscultant les premières étapes de la dégénérescence, plutôt que son naufrage terminal. Comme le disait Aristote dans La Poétique, le pathétique est d’autant plus puissant que la tragédie fait exploser les relations de ceux qui s’aiment : « il faut, sans frapper la vue, constituer la fable de telle façon que, au récit des faits qui s’accomplissent, l’auditeur soit saisi de terreur ou de pitié par suite des événements ».
Extraordinaire ordinaire
Du début à la fin, des premiers soupçons jusqu’aux mots ultimes, Jeanne et Arthur conservent dignité et humour. Les dernières scènes sont poignantes : Jeanne tente de retrouver Arthur, perdu dans le brouillard de la confusion, pendant qu’Arthur cherche désespérément la femme qu’il aime et dont il a oublié la forme et le nom. Terreur et pitié : le cours inexorable de la maladie rappelle la malédiction qui saisit Othello : « l’acte est en cours, il n’y a plus de pause. » Le plus extraordinaire dans cette histoire ordinaire, racontée comme une bluette sentimentale, tient à la manière dont elle convoque les figures les plus hautes de la tragédie classique en les mêlant aux mots susurrés par F. R. David sur les pistes de danse des années 80 : « Words don’t come easy to me / How can I find a way to make you see I love you ». Cette chanson gentiment niaise prend alors une dimension quasi métaphysique, et Jeanne et Arthur, qui se sont rencontrés sur cet air et ces paroles, deviennent, au fil de la pièce, des héros prodigieux. Le courage et l’abnégation de Jeanne et le désespoir bravache d’Arthur les placent à la hauteur des grands couples amoureux torturés par le sort. Marie-Julie Baup et Thierry Lopez sont tout bonnement géniaux dans leurs rôles ! Fluidité, aisance, humour, émotion : les deux interprètes sont confondants de précision, de justesse et de vérité. Tout sert le propos avec intelligence : les costumes de Michel Dussarrat, les lumières de Moïse Hill, la création sonore de Maxence Vandevelde sont remarquables. Le Petit Saint-Martin prouve encore une fois l’excellence de sa programmation, et cette pièce compte parmi les meilleures à voir actuellement à Paris.
Catherine Robert
Du mardi au vendredi, 19h ou 21h ; samedi à 16h et 21h ou 19h. Tél. : 01 42 08 00 32. Durée : 1h15.
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