La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Lourdes

Lourdes - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Colline
Légende : Lourdes est au Théâtre de la Colline. CR : Juliette Parisot

Théâtre de la Colline / texte et mes de Paul Toucang

Publié le 24 avril 2017 - N° 254

Sans être renversante, la création portée par la troupe réunie autour de Paul Toucang est à découvrir. Un vent de fraîcheur venu de Lourdes qui articule à sa façon le sérieux et la dérision.

« Et s’il est vrai que chaque écrivain éclaire le monde d’une lumière qui lui est propre, alors, une écriture naissante est semblable au surgissement d’une fenêtre qui pourrait donner à voir un point de vue original sur le monde, à condition qu’elle puisse résister aux dictatures des modes et des formes et tenir bon face aux influences extérieures ». C’est par ces mots (très justes) que Wajdi Mouawad raconte ce moment capital qu’il nomme par ailleurs « naître au monde », ce moment où un auteur voit pour la premières fois ses écrits portés devant un large public, et où ce large public assiste au dévoilement d’une nouvelle écriture, d’un nouveau regard. En mots plus simples, à quoi ressemble donc le bébé de Paul Toucang, ce jeune homme sorti du conservatoire l’année dernière, et qui officie dans Lourdes à la fois comme auteur, metteur en scène et acteur ? C’est bien la question qu’on se pose en allant découvrir un spectacle au titre qui sonne aussi religieux que grave et pesant, Lourdes.

Entre parodie et recherche de sacralité

A l’entrée, on demande d’éteindre son portable pour respecter le recueillement. En salle, chaque spectateur est gratifié d’une accolade réconfortante. C’est que Gilbert est mort, à l’âge de 68 ans. Et on arrive dans cette salle en tant que membre de la communauté religieuse qu’il avait fondée, pour assister à sa cérémonie funéraire. Passe une première partie de spectacle plutôt interactive et astucieuse dans le genre, à laquelle succède une course à travers la France des femmes légataires du gourou, une sorte de pèlerinage qui les mène jusqu’à Lourdes, jusqu’à l’hôtel Soubirous, sur fond de France paralysée par le meurtre par empoisonnement du candidat à la présidentielle Emmanuel Macron. Pas de poésie claudélienne donc au programme de Lourdes, mais bien plus une forme décalée, slalomant entre l’absurde, l’ironie, le fantastique, le poétique et une économie de moyens scénographiques qui laisse la part belle aux acteurs. Ici, on parle Uber, Tinder, Nuit Debout mais aussi Merveille du spectacle, sorte de Graal qui cristallise in fine la quête des adeptes de Gilbert. On entend donc l’actualité la plus proche, marquée par le terrorisme, mais aussi un texte qui ose les envolées lyriques tout autant que le trash, la trivialité et la dérision. On s’y perd un peu, on se demande parfois où cela veut en venir, mais le rythme, les ruptures de ton et de forme dans les prises de parole soutiennent toute attention sur le point de faillir. On finit sur un accident à la Lynch et une scène d’assaut qui fait penser à Genet, version XXIème siècle, entre parodie et recherche de sacralité. C’est à suivre sans doute de près.

Eric Demey

A propos de l'événement

Lourdes
du mercredi 19 avril 2017 au samedi 13 mai 2017
Théâtre de la Colline
15 rue Malte-Brun, 75020 Paris

Théâtre de la Colline, 15 rue Malte-Brun, 75020 Paris. Du 19 avril au 13 mai, le mardi à 19h, du mercredi au samedi à 20h, le dimanche à 16h. Tel. : 01 44 62 52 52. Durée : 1h40.

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