La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2018 - Gros Plan

L’éveil du printemps

L’éveil du printemps - Critique sortie Avignon / 2018 Avignon
© Jean-Bernard Scotto Alain Batis met en scène L’Eveil du printemps d’Aiat Fayez.

Caserne des Pompiers / texte de Aiat Fayez / mes Alain Batis

Publié le 22 juin 2018 - N° 267

Après Pelléas et Mélisande de Maurice Maeterlinck, Alain Batis met en scène L’Eveil du printemps du jeune auteur Aiat Fayez, centrée sur l’adolescence et le rapport à la différence. Une parabole très bien servie par la mise en scène d’Alain Batis.

Sous-titrée comme la pièce de Frank Wedekind « tragédie enfantine », l’histoire proposée par Aiat Fayez explore plus d’un siècle plus tard les mêmes thèmes de l’éveil de la sexualité, des tumultes de l’adolescence. L’auteur y développe une focale particulière, qui met en jeu le rapport à l’autre dans sa différence au sein d’un univers de science-fiction, où se reconnaissent aisément des enjeux actuels. Le dramaturge met en miroir deux mondes : Platoniun et la Terre. Parmi les Platoniuniens, le jeune A. (Nassim Haddouche) cherche à approcher M. (Pauline Masse), une fille super sexy, avec l’aide de son ami B. (Geoffrey Dahm). Surtout, il rêve de quitter sa planète qu’il exècre pour s’installer sur la si belle planète bleue. « Tout leur a été donné comparé à nous. » confie A., qui décide de s’inscrire à l’université sur la Terre, où il rencontre les Terriens Maurice (Mathieu Saccucci) et Anna (Emma Barcaroli). La pièce est scindée en deux parties, la première sur Platoniun, la seconde sur la Terre, où, d’abord émerveillé, A. va connaître l’amour avec Anna, puis d’amères désillusions. « Etrange étranger » à l’accent et aux codes culturels qui dénotent, il ressent crescendo l’expérience d’une mise à l’écart aussi spontanée que radicale.

Implacable mise en miroir

La parabole se déploie avec une implacable simplicité et fait surgir une banale cruauté du quotidien. On pourrait voir une forme de naïveté dans la fable, mais c’est une mise en lumière de quelques fondements de l’exclusion dans l’espèce humaine qui se révèle, dans une évidence élémentaire. Une peau bleue comme l’est celle de tous les Platoniuniens, un accent et des codes culturels différents, une histoire autre, une hiérarchie qui s’installe… : cela suffit à faire des ravages. Difficile d’inventer un accent inconnu, Alain Batis a donc plutôt travaillé sur le jeu corporel (un enjeu difficile !). Surtout, il orchestre grâce à une scénographie limpide et une superbe vidéo – un lever de Terre, un ciel rouge… – une mise en miroir des deux mondes et une confrontation des sentiments habilement menées. Avec son équipe – dont Cyriaque Bellot pour la musique -, il a construit un écrin sensoriel qui renforce la poésie de la fable, structurée en 41 séquences concises et interprétée par une belle équipe de jeunes comédiens. L’ensemble fluide se tient sur un fil mêlant étrangeté et familiarité. Un conte en forme de radiographie nuancée et concrète.

Agnès Santi

A propos de l'événement

L’éveil du printemps
du samedi 7 juillet 2018 au lundi 23 juillet 2018


à 15h, relâches les 10 et 17 juillet.

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