Notre Histoire de Stéphane Schoukroun et Jana Klein
Stéphane Schoukroun, juif séfarade, et Jana [...]
Le formidable Effet de Serge fait un dernier tour d’honneur avant que Philippe Quesne ne quitte Nanterre. Immanquable.
C’était dans le monde d’avant, en 2008 – le temps passe si vite – et au Festival d’Avignon, Philippe Quesne est invité par Hortense Archambault et Vincent Baudriller à présenter un diptyque – L’effet de Serge et La Mélancolie des dragons. Les deux spectacles y font grande sensation. Douze années plus tard et quelques spectacles non moins étonnants en mémoire, on s’est aperçu que Philippe Quesne a creusé les directions déjà ouvertes dans ces premiers succès. Comme beaucoup de grands artistes, il tourne autour des mêmes obsessions. Le metteur en scène scénographe va dans trois mois quitter la direction du CDN de Nanterre Amandiers, il l’aura dirigé six ans et marqué de son empreinte via un rajeunissement notable du public et une programmation qui lui ressemblait tant, de formes qu’on retrouve trop peu ailleurs dans les circuits. Transmission aux plus jeunes de hits emblématiques de son travail, la reprise régulière ces dernières années du diptyque des débuts dit l’attachement de Philippe Quesne à un travail où se concentrent ses motifs fétiches, parmi lesquels l’art de ne pas prendre l’art au sérieux et de créer des communautés de grands enfants rêveurs, bienveillants et passionnés qui s’émerveillent d’un rien et font œuvre de tout. L’effet de Serge est donc une pièce de répertoire, un collector qui sonne comme une ligne artistique, un projet, une utopie qui prend aujourd’hui malheureusement quelques atours de testament. Quesne n’est pas mort, loin s’en faut. Et il continuera, souhaitons-le, d’arpenter nos scènes. Mais son approche si originale de l’art théâtral disparaîtra un peu, c’est inévitable et malheureux, avec son départ de Nanterre.
À la frontière du banal et du paranormal
On ne saurait donc trop recommander d’aller découvrir ou redécouvrir le grand Gaëtan Vourc’h, acteur fétiche de Philippe Quesne, avec ses airs de doux ahuri, qui reçoit dans son appartement situé on ne sait où les amis qui souhaitent venir assister à ses soirées de performances expérimentales. Performances courtes, à base d’effets spéciaux un peu cheap, dont beaucoup ratent avec un maximum de poésie. Elles génèrent chez ses amis des réactions amicales, c’est bien le moins qu’on puisse en attendre. Ils restent toujours bienveillants même s’ils paraissent parfois n’y rien comprendre. On se rappellera qu’on a vu dans L’effet de Serge une voiture rouler sur le plateau, des comédiens parler peu et comme s’ils ne jouaient pas, des drôles de rituels émailler des rencontres à la frontière du banal et du paranormal, et un comédien surgir en tenue de cosmonaute derrière la baie vitrée d’un pavillon de banlieue. C’était la patte Quesne qui faisait irruption sur nos scènes. Un univers délicat et drôle qui rappelle sans cesse, comme le disait si bien Robert Filliou, que « l’Art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’Art ».
Eric Demey
Du 15 au 20 décembre. Tel. : 01 46 14 70 00. Durée : 1h20. Spectacle vu au Carré-les Colonnes à Blanquefort.
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