La Terrasse

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Avignon 2023 - Théâtre - Critique

« Le Songe d’une nuit d’été » de Jean-Michel d’Hoop, une version queer, comique, marionnettique et jouissive

« Le Songe d’une nuit d’été » de Jean-Michel d’Hoop, une version queer, comique, marionnettique et jouissive - Critique sortie Avignon / 2023 Avignon Le 11 · Avignon
Le Songe d’une nuit d’été © Debby Termonia

Avignon Off / Le 11 • Avignon / Mise en scène Jean-Michel d’Hoop

Publié le 11 juillet 2023 - N° 312

Pour son Songe d’une nuit d’été, Jean-Michel d’Hoop propose une mise en scène fluide et comique en utilisant des corps marionnettiques. Son interprétation de la forêt comme le lieu d’une fête queer et décomplexée donne au spectacle un côté flamboyant et jouissif. C’est un cadeau pour spectateurs et spectatrices fatigués ou blasés.

Il y a bien des façons d’aborder ce classique : insister sur sa dimension comique, ou exploiter la licence donnée par l’espace onirique du pays des fées, ce sont des axes qui ne sont pas nouveaux. Mais ici l’utilisation de la marionnette permet de trouver une dynamique originale, un endroit physiquement moins contraint où toutes les fantaisies sont permises, une manière de remettre du jeu dans le jeu. L’interaction marionnettes-marionnettistes renforce encore la confusion dans une intrigue où les personnages se manipulent déjà les uns les autres dans un chassé-croisé amoureux inextricable. Car il est question d’amour dans l’œuvre de Shakespeare, et Jean-Michel d’Hoop y ajoute une fête des corps émancipés – marionnettes et marionnettistes se mélangeant dans l’étreinte. S’y ajoute un soupçon de pantalonnade, puisque pour camper la troupe amateure les interprètes se griment en clowns.

Shakesqueer empire

Autant dire – et c’est merveilleux – que ce n’est pas un spectacle qui se prend trop au sérieux. Mais l’incarnation, la manipulation, sont, elles, travaillées sérieusement. En plus d’appuyer sur la dimension comique, Jean-Michel d’Hoop nous parle au fond de liberté. Le couple d’Obéron et Titania, et tout l’aréopage du peuple sylvestre, vit une sexualité libre, échappe aux assignations de genre, ne s’interdit ni le latex moulant ni la comédie musicale. Difficile de ne pas penser à Johanny Bert, dans une esthétique différente mais également belle, la différence étant que Le songe d’une nuit d’été ne se limite pas au pays des fées-queers. Le monde des humains existe aussi, et contraste avec celui de la forêt : le Duc et sa promise, ainsi qu’Égée, sont des nabots colériques et autoritaires qui s’expriment dans un franglais où surnagent quelques vers dans leur version d’origine. Cette irrévérence pour l’autorité est le pendant de la tendresse marquée à l’égard des comédiennes et comédiens maladroits de la troupe de Peter Quince. Ce qu’il faut en retenir, c’est que le plaisir qu’ont les interprètes à porter cette proposition gentiment anarchiste est flagrant, et qu’il est partagé par la salle. Ce spectacle vivifiant, jamais prétentieux, offre une expérience de spectateur assez jouissive qui fait beaucoup de bien.

Mathieu Dochtermann

A propos de l'événement

Le Songe d’une nuit d’été
du vendredi 7 juillet 2023 au mercredi 26 juillet 2023
Le 11 · Avignon
11 boulevard Raspail, 84 000 Avignon

à 22h10. Relâche les 13 et 20 juillet.

Tél. : 04 84 51 20 10.

Durée : 1h40.

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