La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon - Critique

Le Nid de cendres, fleuve aurifère, mise en scène Simon Falguières

Le Nid de cendres, fleuve aurifère, mise en scène Simon Falguières - Critique sortie Avignon / 2022 Avignon La Fabrica
© Christophe Raynaud de Lage

La FabricA / texte et mise en scène de Simon Falguières

Publié le 17 juillet 2022 - N° 301

Hommage aux pouvoirs du théâtre, éloge de l’imagination, expérience enthousiasmante – comme toujours celle des fresques dont Avignon a le secret – Le Nid de cendres est un spectacle généreux et fécond.

Épopée théâtrale de treize heures en sept parties, mais aussi aventure de troupe qui dure depuis sept ans, Le Nid de cendres est de ces fresques monumentales qui font l’histoire du festival avignonnais. Ceux qui réussissent la traversée de ce fleuve oublient évidemment les quelques bancs de sable qui la ralentissent, tant le bonheur est grand d’avoir passé une journée à entendre dire qu’il n’est pas de meilleur viatique que le théâtre pour affronter les aléas de l’existence, ni de meilleurs compagnons de vie que les raconteurs d’histoire et les fabricants d’illusions. Il faut dire l’immense plaisir de la compagnie partagée avec une troupe de comédiens protéiformes, tous brillants, pétulants, profonds, émouvants, drôles, et la joie de passer du drame à la farce, de la comédie à la tragédie lyrique, des larmes aux rires. De l’aveu même de Simon Falguières, qui a l’élégance de l’humour et l’humilité de la déférence, il y a tout dans son théâtre, de Shakespeare à L’Illusion comique, des alarmes antiques à la critique des errements du libéralisme, de la mise en garde contre l’aveuglement destructeur des hordes désespérées à la dénonciation du cynisme froid des politiciens machiavéliques prêt à brûler les théâtres.

Se souvenir de l’avenir

L’imagination fabrique ses chimères à partir de matériaux qu’elle emprunte à l’existant : rien d’étonnant, dès lors, si l’on reconnaît les influences qui nourrissent Le Nid de cendres, d’autant que rien n’est caché des secrets de fabrication de ce théâtre-monde. Les arbres qu’invente Simon Falguières ont des branches aussi longues que leurs racines : la piété filiale est la garantie de faire de robustes enfants ! La beauté de cette geste épique, qui mêle l’histoire et la légende, les hommes et les dieux, les aveugles et les voyants, la musique et la lumière, tient aussi à cette confiance en la capacité thaumaturgique de la poésie, qui crée des monstres marins aux noms farfelus, des résidents de l’Olympe à attaché-case, des jardiniers amoureux et des princesses dramaturges. Les comédiens naviguent entre les mondes, celui des contes où l’on s’ennuie à force de perfection et celui d’une réalité post-apocalyptique où l’on se nourrit de mûres et de racines. Entre les deux, se tient la roulotte des comédiens, semblable à l’ermitage où Ernst Jünger installe les optimates qui tâchent de demeurer à l’abri des fureurs du Grand Forestier. Simon Falguières parle à notre époque, et sa jeunesse exaltée trouve une oreille attentive chez les jeunes spectateurs enthousiastes. Vibrante et enflammée, généreuse et tendre, cette jeunesse mérite qu’on l’écoute se souvenir de l’avenir.

 Catherine Robert

A propos de l'événement

du samedi 9 juillet 2022 au samedi 16 juillet 2022
La Fabrica
La FabricA, 11 rue Paul Achard, 84000 Avignon

Les 9 et 10, 12 et 13, 15 et 16 juillet, à 11h. Tél. : 04 90 14 14 14. Durée : 13h.

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