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festival d'aix-en-provence - critique
Plus de vingt ans après le spectacle de Klaus Grüber, Le Couronnement de Poppée de Monteverdi revient au Festival d’Aix-en-Provence dans une mise en scène de Ted Huffman, avec un plateau de jeunes chanteurs, accompagnés par l’expressivité luxuriante de la Cappella Mediterranea, sous la direction de Leonardo Garcia Alarcon.
Dernier opéra de Monteverdi, Le Couronnement de Poppée est, selon des usages courants à l’époque, un travail collectif qui a connu plusieurs versions au gré des représentations et des manuscrits conservés. Fin connaisseur de la musique italienne du XVIIème siècle, Leonardo Garcia Alarcon a retenu la mouture originale de Venise, dont l’intimisme des effectifs contrastent avec la flamboyance de l’opéra romain de l’époque, à laquelle il s’opposait dans une écriture plus proche du théâtre musical, sinon du madrigal, et que le continuo de Cappella Mediterranea fait ressortir avec un luxe d’expressivité tel que Patrice Chéreau voulait monter l’ouvrage avec l’ensemble du chef argentin. Ted Huffman s’inscrit dans une même décantation, au plus proche de la nudité du théâtre que le metteur en scène américain reprend d’un spectacle à l’autre, avec une maîtrise qui risque de confiner au procédé. Dans l’épure scénographique dessinée par Johannes Schütz, meublée d’un agrès en suspension, image prévisible du Destin, les personnages évoluent à vue dans des numéros hauts en couleurs qui s’enchaînent sans temps mort. L’ambiguïté des coulisses à découvert rejoint celle d’un livret irrésistiblement amoral. Les lumières de Bertrand Couderc rythment efficacement les césures émotionnelles entre les séquences.
Les inimitables saveurs de Cappella Mediterranea
Le plateau de jeunes solistes, dont plusieurs sont d’anciens membres de l’Académie du Festival, réservent une saveur qui ne craint pas de moquer les bienséances, à l’exemple de la scène de triolisme entre Poppée, Néron et Lucain, qui emmène le reste des protagonistes vers l’arrière-scène, à la fin de la première partie, après la mort de Sénèque, ouvrant l’entracte sur une esquisse d’orgie. Jacqueline Stucker impose une Poppée à la voix plantureuse, aux côtés du Néron nerveux de Jake Arditti. Octavie idéalement doublée en Vertu dans le Prologue, Fleur Barron fait valoir les chromatismes des souffrances de l’impératrice déchue, qui, pour conjurer son sort, essaie de se servir d’Othon, confié au lyrisme investi de Paul-Antoine Bénos-Djian, un des contre-ténors de la nouvelle génération à suivre. Mentionnons, parmi les incarnations polyvalentes, la sévérité robuste d’Alex Rosen en Sénèque, la fraîcheur de Maya Kherani en Drusilla, ou encore l’impayable faconde des travestis de Miles Mykkanen, Arnalta et la Nourrice. Mais c’est peut-être avant tout l’exceptionnelle souplesse expressive de la direction de Leonardo Garcia Alarcon, avec un sens du rubato qui magnifie la richesse inouïe du continuo de Cappella Mediterranea – sans doute le meilleur de la scène baroque du moment – qui fait tout le sel de ce Couronnement de Poppée, où les chatoiements de l’intimisme rivalisent avec ceux d’un orchestre et d’une grande scène.
Gilles Charlassier
à 20 heures, le 14 et 17 juillet à 17 heures. Durée : 3h30. Tél : 08 20 92 29 23.
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