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Avignon - Critique

Le Cas Lucia J. (un feu dans sa tête) d’Eugène Durif avec Karelle Prugnaud, mise en scène d’Éric Lacascade : au plus près de la fille de Joyce

Le Cas Lucia J. (un feu dans sa tête) d’Eugène Durif avec Karelle Prugnaud, mise en scène d’Éric Lacascade  : au plus près de la fille de Joyce - Critique sortie Avignon / 2022 Avignon Artéphile
© Simon Gosselin Karelle Prugnaud dans Le Cas Lucia J. (un feu dans sa tête)

Artéphile / Texte d’Eugène Durif / Mise en scène d’Éric Lacascade

Publié le 14 juillet 2022 - N° 301

Dans une mise en scène d’Éric Lacascade, la comédienne et performeuse Karelle Prugnaud et l’auteur Eugène Durif poursuivent avec Le Cas Lucia J. (un feu dans sa tête) une recherche commune de longue date. Seule en scène, l’actrice incarne la fille de James Joyce tout en rendant palpable cette amitié artistique. Intense et passionnant.

Au Festival d’Avignon, c’est surtout comme metteure en scène qu’est connue Karelle Prugnaud. En 2018, elle y signait un spectacle jeune public adapté d’un texte de Nathalie Papin, Léonie et Noélie. Et l’an dernier, toujours dans le In, elle présentait en itinérance son Mister Tambourine Man, écrit par Eugène Durif et interprété par Denis Lavant et Nikolaus Holz. Dans le Off aujourd’hui, on découvre le visage et le jeu de cette artiste singulière, versée dans la performance – on l’a par exemple vue récemment en prêtresse d’un culte centré sur la tomate dans la chapelle Reille à Paris, programmée par le Théâtre 14. Seule en scène dans Le Cas Lucia J. (un feu dans sa tête), elle incarne sous la direction d’Éric Lacascade la fille oubliée de James Joyce. Une danseuse, une schizophrène. Retrouvant avec bonheur l’écriture d’Eugène Durif, avec qui elle cherche depuis la fondation de sa compagnie L’Envers du décor en 2005 à décloisonner le théâtre, Karelle Prugnaud nous fait entrer dans la tête du personnage éponyme, alors interné en hôpital psychiatrique.

Une danseuse folle, amoureuse

Tantôt bondissante, tournoyante sur les très hauts talons qui occupent une place de choix dans son esthétique très visuelle et physique, tantôt tout en chuchotements, l’actrice subtilement dirigée par son metteur en scène met son vocabulaire personnel au service de Lucia. Elle n’en fait ni une victime, ni une combattante contre la loi masculine qu’elle subit – son frère l’enferme, et les médecins qui la torturent sont tous des hommes –, mais une femme complexe. Un individu en quête d’un langage à lui pour dire le monde, empêché notamment en cela par un père qui en a créé un difficile à égaler. La folie, sans doute, en fait partie. Le Cas Lucia J. ne dira jamais à quel point. C’est là l’une de ses beautés, l’un de ses courages. En ne disparaissant jamais tout à fait derrière son personnage d’internée, Karelle Prugnaud mène de plus une partition aux strates multiples. Les deux brefs moments où Eugène Durif intervient pour donner quelque conseil à la comédienne en montrent très délicatement l’organisation. Ils font dialoguer le réel du plateau avec le réel de Lucia, ou ce qu’ils en imaginent.

Anaïs Heluin

A propos de l'événement

Le Cas Lucia J. (un feu dans sa tête)
du jeudi 7 juillet 2022 au mardi 26 juillet 2022
Artéphile
7 rue Bourgneuf, 84000 Avignon

à 21h45. Relâche les 13 et 20 juillet. Tel : 04 90 03 01 90. https://artephile.com

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