Amour et Psyché, d’après Molière, mis en scène Omar Porras
Omar Porras et son équipe revisitent le mythe [...]
Une histoire familiale avec deux acteurs et deux tabourets, la simplicité au théâtre est une vertu que Le bois dont je suis fait sublime.
Les histoires de famille se ressemblent beaucoup. Celle des Lachassette a été imaginée par deux garçons, comédiens, Julien Cigana et Nicolas Devort, qu’on retrouve sur scène pour en interpréter tous les personnages. Comme chez Aznavour, c’est la maman qui va mourir, et les hommes sont de retour, en l’occurrence Tristan. Comme chez Lagarce, le fils maudit, c’est celui qui a quitté la petite ville de province pour mener à la capitale une vie plus libre, instable, du point de vue affectif comme du point de vue professionnel. Une différence, Tristan est hétérosexuel. Mais d’une famille où, comme souvent, le père impose sa colère et ses rapports de force, quand la mère est plus souple, à l’écoute, accommodante. De cette ville de Chabris, près de Lyon, où vivent les aînés, le frère de Tristan, lui, n’a pas bougé. Il travaille dans l’immobilier avec son paternel, s’est marié, va avoir un deuxième enfant, un schéma bien trop traditionnel dans lequel il ne trouve visiblement pas son bonheur. Les histoires de famille se ressemblent beaucoup, donc, comme nos existences. Et celle du Bois dont je suis fait, tout aussi comique que tragique, souligne combien il est difficile de se libérer de ce qui nous a façonnés, avec autant d’humour que de sensibilité.
Tout fonctionne à la perfection
Sur scène, deux acteurs et deux tabourets. Avec de simples gestes, de petites mimiques et d’une pointe d’accent parfois, ils interprètent les dix personnages qui s’entrecroisent au cours de ces rendez-vous familiaux qui se rapprochent aussi vite que la mort de leur mère. Les scènes s’enchaînent à un rythme soutenu – scènes de repas, de disputes, d’intérieur et d’extérieur – et prennent corps grâce à un travail sonore et de lumières bien dosé, mais aussi par des dialogues elliptiques et efficaces qui dessinent les rapports entre les personnages en même temps qu’ils font avancer l’action. Dans la mise en scène et en jeu de Clotilde Daniault, tout fonctionne à la perfection. Nicolas Devort, émouvant dans ses personnages aux teintes féminines, et Julien Cigana, penchant plus vers le bourru masculin, ne sont jamais loin de l’ordinaire mais échappent toujours à la facilité des clichés. Ils font prendre vie à chacun de leurs rôles comme ils font exister chaque situation. Un tour sur eux, un noir, et les voilà lancés dans un autre espace, à interpréter d’autres personnages. Pièce cinématographique dans son découpage, Le bois dont je suis fait happe aussi parce qu’il parle de cette famille qui nous constitue, qui nous définit, inéluctablement, qu’on veuille ou pas s’en extirper. Il rappelle aussi combien la matière brute du théâtre ressemble à celle de nos vies. Des corps, des mots, dans un monde vide que l’on remplit d’imaginaire.
Eric Demey
Le dimanche à 20h30, le lundi à 21h15. Tel : 01 48 06 72 34. Durée : 1h30.
Omar Porras et son équipe revisitent le mythe [...]