Juliette et les années 70

Heureuses retrouvailles avec Flore Lefebvre des Noëttes, qui poursuit l’admirable traversée de son histoire familiale, à travers un second monologue toujours aussi épique, truculent et libérateur. A la fois pudique comme pour tenir à distance l’émotion et capable de rire avec légèreté des douleurs. La Mate, créé en 2015 avec succès à la Comédie de Picardie, abordait l’enfance dans les années 60 au cœur d’une famille singulière et… très nombreuse. “La Mate“ et “le Pate“. La Mater et le Pater d’une dizaine d’enfants, où les plus âgés éduquent avec plus ou moins de nonchalance les plus jeunes. Elle, Mère Courage dévote. Lui, militaire maniaco-dépressif.

Recréer le lien avec le passé

Un alliage en tous points explosif lorsque la progéniture atteint les rives de l’adolescence et ses étapes obligées : le collège, le lycée, l’aumônerie, les premières amours, l’apprentissage au théâtre… Entre le Pate régulièrement en crise, et la Mate toujours occupée, les espaces de liberté sont énormes. Accompagnée par les Beatles, Janis Joplin, Pink Floyd, Deep Purple et autres voix légendaires, sans oublier Nino Ferrer ou le Concerto pour une voix de Saint-Preux qu’aimait tant la Mate, Juliette grandit avec la fougue et l’énergie de la jeunesse lorsqu’on a la vie devant soi. Ce second opus explore une multitude de rites plus ou moins périlleux. Entre sincérité généreuse et distance amusée, la comédienne construit un lien avec son passé profondément touchant, un lien d’une force comique virevoltante qui nécessairement invite chacun à interroger sa propre mémoire. En sachant la sublimer !

Agnès Santi