La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Joël Dragutin

Joël Dragutin - Critique sortie Théâtre
Crédit photos bâtiment : Dominique Chauvin Légendes : L’entrée du public en forme d’atrium relie l’ancien au nouvel édifice

Publié le 10 mai 2012 - N° 198

LE FRUIT D’UN BEAU COMBAT

« Le Théâtre 95 achève sa métamorphose ». Patiemment, le directeur des lieux, auteur et metteur en scène Joël Dragutin a œuvré pour planter un nouveau décor et faire aboutir le projet d’agrandissement. Dans la continuité du bâtiment historique daté des années 70 prend aujourd’hui place un nouvel édifice plaqué de cuivre comme de feuilles d’or, au toit couronné, abritant une nouvelle salle équipée dernier cri et chaleureuse à l’envi.

« La surface du lieu est aujourd’hui triplée, ce qui va nous permettre d’accueillir plus de spectacles et de public. »

Êtes-vous aujourd’hui un homme de théâtre heureux ?

Joël Dragutin : L’aboutissement de ce projet d’extension important est le fruit d’un combat de quinze ans. Mais je ne boude pas mon plaisir. Je salue le geste politique. Donner une réponse artistique et culturelle à la crise économique que nous traversons, c’est non seulement juste mais fort et courageux de la part du président de l’agglomération de Cergy-Pontoise, Dominique Lefebvre.  La surface du lieu est aujourd’hui triplée, ce qui va nous permettre d’accueillir plus de spectacles et de public.  Une augmentation quantitative en phase avec l’actualité humaine de ce territoire : un bassin de 400 000 personnes, l’une des plus jeunes agglomérations de l’hexagone en termes de moyenne d’âge avec 25 000 étudiants, une population très diversifiée à l’image de la France contemporaine. D’un point de vue qualitatif, nous allons être en mesure de faire place à des créations plus « lourdes », plus originales, sur le plan scénographique et technique. La salle historique, aux sièges notamment refaits, donne place aujourd’hui à deux cents personnes et la nouvelle salle, d’une jauge de quatre cents spectateurs, est modulable. Bi-frontal, tri-frontal, quadri-frontal, tout est permis. Dans l’atrium, qui relie l’ancienne partie du bâtiment à la nouvelle, hall d’accueil du public, on trouvera outre la billetterie, une petite librairie et le moyen de rejoindre le bar du théâtre, « Le Café de la Plage », pouvant accueillir jusqu’à cent cinquante personnes où prendront place de petites formes, des lectures, des débats, des rencontres. Je suis heureux de voir que cette extension a pris la forme souhaitée : un complexe convivial, à la circulation fluide, fabriqué pour que le public se sente ici chez lui.

Quels sont les temps forts de la saison prochaine ?

J.D : Nous allons d’abord fêter l’événement de cette métamorphose en mai et juin. Déambulations, journées portes ouvertes, fêtes d’inauguration proprement dites vont saluer la nouvelle configuration des lieux. Le Théâtre 95 étant Scène conventionnée aux écritures contemporaines, la saison 2012/2013 s’ouvre avec une création que je signe, en tant qu’auteur et metteur en scène, intitulée Une maison en Normandie. En allant à l’essentiel, je dirais que la pièce, montée en collaboration avec le Jeune Théâtre National, interroge le désir aujourd’hui. En suivant le calendrier, et toujours en octobre, nous accueillons le Tartuffe de Mario Gonzalès, maître du théâtre de masques. En décembre, les cergypontains sont de nouveau à l’honneur. Trois auteurs, Elsa Solal, Pierremont et moi-même, avons posé à une centaine d’habitants la même question : « Quel est le moment de votre vie où vous avez eu la sensation de faire un choix déterminant ? ». A partir de ces entretiens nous avons en charge de construire trois textes courts dont la mise en scène est confiée à Diane Calma. En co-production avec le théâtre de la Bastille en Avril, nous programmons Lost (Replay), pièce en forme de fable contemporaine parlant des dislocations et des errances de notre monde, écrite et mise en scène par Gérard Watkins. En accord avec notre vocation, nous renouons avec le Festival Les Contemporaines consacré à la découverte d’un auteur dramatique contemporain majeur, cette année Fabrice Melquiot. Dans cette droite ligne, cette saison  inaugurale offre également l’opportunité de découvrir quatre jeunes compagnies prometteuses au mois de mars. Enfin, nous sommes heureux de pouvoir annoncer la deuxième édition du festival des Cultures Africaines ; l’an dernier, huit à dix mille personnes, dont plus de la moitié n’avait jamais mis les pieds au théâtre, étaient au rendez-vous.

Votre théâtre a toujours fait une large place aux débats d’idée. Quelles sont les rencontres mises au programme en 2012/2013 ?

J.D : Au cœur du théâtre se doit d’exister un espace de réflexion et de débats sur les grandes questions et les enjeux contemporains. Il y a quinze ans que nous proposons ces temps d’expression démocratique sur le monde avec des figures marquantes de la pensée critique. Quatre rencontres, conférences-débats, sont mises au programme la saison prochaine. Notre premier invité est Pierre Carles, « documentariste bredouillant mais malin » comme il se définit lui-même sur le thème « La critique des médias est un sport de combat ». En janvier, la parole est donnée à Gilles Finchelstein, qui interroge : « Pouvons-nous résister à l’urgence ? ». Gilles Kepel vient en février s’exprimer sur l’après des révolutions du monde arabe. En avril, nous accueillons Olivier Poivre d’Arvor, actuel directeur de France Culture,  qui intervient sur les relations entre culture et politique. Et un grand colloque clôt la saison sur le thème de la crise de la représentation démocratique. Autant d’occasions de dialogue, autant de besoin de théâtre, pour un public identifié comme le destinataire aussi bien que le sujet de la parole théâtrale.

           

Propos recueillis par Marie-Emmanuelle Galfré


Journées portes ouvertes au théâtre, le samedi 12 et le dimanche 13 mai 2012 de 10h à 17h. Fêtes d’inauguration du théâtre, les 22, 23 et 24 juin 2012. Parades déambulatoires et clownesques avec la compagnie Les Goulus, du 9 au 12 mai 2012, du 16 au 19 juin 2012. Présentation de la saison 2012/2013, le vendredi 22 juin à 20h. Théâtre 95, Scène conventionnée aux écritures contemporaines, allée du Théâtre, 95 021 Cergy-Pontoise. Tél : 01 30 38 73 22. www.theatre95.fr

A propos de l'événement


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