Le partenariat université et école de danse
Marina Nordera, professeur au sein de la [...]
Etat des lieux de la danse en France
Le patrimoine consiste en ce nous sommes capables d’offrir aux générations suivantes : s’entrechoquent dans cette notion les questions de l’histoire de la danse, de la conservation des œuvres, de leur transmission, et de la diffusion de ce patrimoine.
La danse classique, parce qu’elle suppose l’utilisation d’un vocabulaire académique, parce qu’elle a mis en place très tôt les conditions de sa notation, parce qu’elle a porté la question du répertoire au cœur de son existence, a œuvré dans le sens de son Histoire. La danse contemporaine a longtemps véhiculé l’idée fausse d’un art de l’éphémère : troupes intermittentes, difficultés à fixer de façon tangible les processus dans le corps des interprètes, nécessité de réactualiser l’œuvre à chaque représentation, ou faible survie des pièces en diffusion (en moyenne, une pièce se joue 4 à 5 fois). Tout concourt à évacuer la question du patrimoine en s’appuyant sur l’immatérialité de la danse. Pourtant, l’histoire est en marche depuis bien longtemps ; la résistance s’organise et apparaît désormais au grand jour des politiques publiques. Dans le contexte actuel favorisant toujours la création, constituer un patrimoine revient alors à travailler sur les conditions de l’existence de traces pour la constitution d’une mémoire. On compte sur la notation (Laban et Benesh, enseignées au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, mais coûteuses à utiliser) et sur la vidéo à la fois comme outil de conservation des œuvres et comme moyen de transmission.
Patrimoine vivant
Le Centre National de la Danse s’est positionné comme un acteur fort de la conservation et du développement de la culture chorégraphique. Sa médiathèque renferme un fonds de partitions chorégraphiques et de vidéos de spectacles, à côté de la Cinémathèque de la Danse qui s’installera prochainement. Deux récents dispositifs d’aide sont emblématiques de cette volonté. « L’aide à la recherche et au patrimoine en danse » permet à des chercheurs de mener à bien leurs travaux et à des notateurs de porter leurs projets de notation. « Danse en amateur et répertoire » permet à des danseurs professionnels de remonter des pièces avec des amateurs. Jours Etranges de Dominique Bagouet, recréé par Catherine Legrand et Anne-Karine Lescop en mars prochain avec des adolescents, en est un exemple. La notion de patrimoine en danse ne peut rester figée dans le temps, comme l’explique Régis Plaud, conseiller danse à l’ONDA : « Sur cette question du patrimoine, nous restons sur nos définitions premières, c’est-à-dire l’accompagnement d’œuvres contemporaines ». Et certains chorégraphes, aujourd’hui, reprennent et réinterrogent des œuvres patrimoniales. Les tentatives de questionner la danse à l’aune de sa mémoire font bouger les lignes, telle l’exposition Danser sa vie, danse et arts visuels de 1900 à nos jours au Centre Pompidou. Numéridanse, ou la présentation de ballets sous forme de projections dans des cinémas constituent de nouveaux outils pour une diffusion de masse de la culture chorégraphique. Mais au tournant du siècle, il s’agira de construire un patrimoine toujours en mouvement, questionné par le vivant et les artistes, plus que par la dématérialisation.
Nathalie Yokel