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S’adapter et devenir autonome

S’adapter et devenir autonome - Critique sortie Danse
Crédit : Marie-Laure Briane Légende : Paola Cantalupo

Ecole Supérieure de Danse de Cannes Rosella Hightower/ Ecole Nationale Supérieure de Danse de Marseille
Entretien / Paola Cantalupo

Publié le 27 février 2016

Comment former les interprètes d’aujourd’hui pour les chorégraphes de demain ? Nous avons interrogé Paola Cantalupo, directrice Artistique et Pédagogique de l’Ecole Supérieure de Danse de Cannes Rosella Hightower, et de l’Ecole Nationale Supérieure de Danse de Marseille pour le cycle supérieur.

Comment peut-on former des danseurs qui vont être recrutés par des chorégraphes ?

Paola Cantalupo : Il y a énormément de danseurs dans le monde, et les compagnies recrutent internationalement. Il est donc indispensable, quand on dirige une école, d’être attentif au paysage chorégraphique mondial.

Comment évaluer ce paysage mondial ?

Paola Cantalupo : Je suis au jury du Prix de Lausanne depuis vingt ans, après avoir été une petite lauréate. Les écoles les plus importantes du monde y sont réunies, et nous en profitons pour échanger nos points de vue. C’est un très bon observatoire des tendances de l’enseignement. D’autant que le Prix de Lausanne ne se cantonne plus au classique. Par exemple, nous avons remarqué que les garçons sont très avancés et répondent mieux aux demandes. En Finale, on trouve plus de garçons que de filles. C’est une inversion totale. C’est impressionnant ! C’est un détail mais ça dit quelque chose. Les filles sont-elles bien préparées ?

Cela ne vient-il pas du fait que les garçons s’accrochent moins à un stéréotype « classique » ?

Paola Cantalupo : C’est tout à fait possible. À l’étranger on s’aperçoit que l’enseignement distingue beaucoup moins le classique et le contemporain, c’est beaucoup plus poreux entre les deux styles. La Palucca Schule (Dresde) ou CodArt (Rotterdam), écoles contemporaines, ont un niveau classique magnifique, et savent aller aussi très loin dans l’expérimental. Ils ont tous des ateliers d’improvisation, y compris à Lisbonne, à Madrid…

Selon vous, quelle est la qualité la plus importante d’un interprète d’aujourd’hui ?

Paola Cantalupo : Pour moi le plus important, c’est la capacité d’adaptation. On arrive, je crois, assez bien à les préparer en ce sens à Cannes ou Marseille, avec une formation assez éclectique pour qu’ils puissent ouvrir des portes différentes. Ce ne sont pas forcément les meilleurs techniciens qui sont choisis. Voilà longtemps que les directeurs ne recrutent plus sur les 32 fouettés ou les quatre tours de pirouette. Ils attendent une aisance, une maîtrise technique, certes, mais aussi de la maturité, de la curiosité, de la personnalité et la faculté de passer de la Giselle de Petipa à celle de Mats Ek sans sourciller.

« Voilà longtemps que les directeurs ne recrutent plus sur les 32 fouettés ou les quatre tours de pirouette ».

S’ils ne regardent plus les prouesses techniques, que regardent-ils en audition ?

Paola Cantalupo : Ils  regardent la qualité du mouvement, l’articulation, la coordination gestuelle, la musicalité, un équilibre, une harmonie.

Qu’est-ce qui a changé quand on entre dans une compagnie aujourd’hui?

Paola Cantalupo : Tout va plus vite. On prend et on jette les danseurs. Les directeurs n’attendent plus qu’ils évoluent au sein d’une compagnie, les danseurs doivent être opérationnels immédiatement. Et les danseurs aussi veulent aller partout. Un an ici, un an là. Je suis obligée de les freiner. Comme dans de nombreux domaines, le fonctionnement est aujourd’hui global. Donc pour sortir du lot, il faut être différent, et autonome.

Quelles sont leurs chances d’être engagés au sortir d’une école telle que la vôtre ?

Paola Cantalupo : Je pense qu’on arrive à leur donner des outils. De l’assurance, de la maîtrise. 80% de nos élèves sont engagés dans des compagnies permanentes. Donc nous sommes plutôt heureux de nos résultats !

 

Propos recueillis par Agnès Izrine

 

École Supérieure de Danse de Cannes Rosella Hightower, 21 Chemin de Faissole, 06250 Mougins. Tél. : 04 93 94 79 80.

École Nationale Supérieure de Danse de Marseille, 20 Boulevard de Gabès, 13008 Marseille. Tél. : 04 91 17 08 40.

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