PIC de Yann Ecauvre

Être ensemble et faire ensemble, musiciens et circassiens, artistes et public. Ouvrir une parenthèse poétique où le partage est le maître-mot. C’est vers cet horizon utopique que tendent Yann Ecauvre et ses complices du Surnatural Orchestra et du Cirque Inextremiste. Ce n’est pas leur première collaboration : en 2016 déjà ils avaient créé ensemble le spectacle Esquif. Dans PIC, on sent une complicité qui rend parfois la frontière ténue entre circassiens et membres de l’orchestre. Le défi est ici de mettre toute la distribution en mouvement, dans l’espace d’un grand chapiteau. Les musiciens ne sont pas statiques : individuellement ou en groupe, libres ou encordés, il s’agit de les engager physiquement dans la mise en piste. Par des principes d’équilibres et de contrepoids typiques de l’écriture de Yann Ecauvre, les uns et les autres se tirent, se soulèvent, se maintiennent, dans des figures joliment précaires.

Une œuvre qui défie la gravité

Si l’orchestre commence donc sur une plateforme, il en descend bientôt en glissant le long d’un trampoline incliné. L’agrès n’a pas commencé à cet endroit : le public a aidé à le déplacer, créant un intermède participatif dont il y aura quelques redites. Une proximité s’instaure ainsi, qui se prolonge avec le passage de musiciens dans les gradins, et le positionnement du trampoline à fleur de public quand Rémi Bezacier s’y élance. PIC joue un maximum sur la verticalité, en s’appuyant sur un système de rails accrochés au faîte, servi par un régisseur évoluant tête en bas. L’accroche mobile permet de belles évolutions à la corde de Viivi Rohia, et autorise diverses suspensions : les membres de l’orchestre, dont les costumes dissimulent des harnais, défient tour à tour la gravité. Visuellement et métaphoriquement, Fabrice Dominici fait de même en utilisant divers objets volants, créant des parenthèses poétiques au milieu du spectacle. L’ensemble est sympathique et ludique, même si la volonté de faire participer le public et la vingtaine de musiciens créent des transitions entre les scènes souvent assez longues, et met parfois la dimension circassienne du spectacle assez en retrait. Dans l’ensemble, les spectateurs ressortent de PIC avec un large sourire : c’est le signe que cette œuvre qui joue à échapper à la gravité a été reçue avec plaisir.

Mathieu Dochtermann