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Le hip hop : l’âge de la maturité

Le hip hop : l’âge de la maturité - Critique sortie Danse
© Michel Cavalca

Publié le 30 novembre 2011

Le directeur du Centre Chorégraphique National de Créteil est un des piliers du mouvement hip hop en France. Chorégraphe associé à la prochaine édition du Festival Montpellier Danse, il met en avant l’idée d’un hip hop qui ne cesse d’évoluer, et se construit au fil des croisements.

Les danseurs de votre génération ont été les témoins et acteurs de l’avènement du hip hop en France. Comment l’avez-vous vécu ?
Mourad Merzouki :
Je fais partie de toute cette génération qui a pratiqué le hip hop d’abord un peu naïvement, c’est-à-dire sans se poser la question de savoir si on était danseur ou pas, dans un courant qui nous a tous touchés à l’époque du fait de sa médiatisation. On le faisait pour le plaisir mais on n’imaginait pas que le hip hop allait prendre cette dimension vingt ans plus tard. Notre chance a été de croiser des personnalités comme Guy Darmet à la Maison de la Danse de Lyon, Olivier Meyer à Suresnes, ou Christian Tamet au Théâtre Contemporain de la Danse. Toutes ces personnes nous ont, à un moment donné, permis de rentrer dans les théâtres, de croiser des chorégraphes contemporains, de côtoyer le monde de la danse. Etre invité en 1994 à la Biennale de la Danse de Lyon, et se rendre compte de l’écoute du public, de la presse, des critiques qui nous encourageaient, nous a montré que nous n’étions pas un phénomène de mode mais que nous portions un vocabulaire à nourrir et construire.

« Personne, il y a vingt-cinq ans, n’aurait pensé que le hip hop en serait là aujourd’hui ! »

Aujourd’hui deux mondes semblent co-exister, celui des battles et celui de la danse sur scène, liée à une démarche d’auteur… Comment se répondent-ils ?
M. M. :
Ils sont complémentaires. Je trouve essentiel que les battles continuent à exister : c’est de la compétition, dans un esprit sportif. Cela rappelle les débuts de la danse hip hop. Aujourd’hui, dans mes spectacles, je retiens souvent des danseurs qui en sont issus parce que techniquement, ils sont habitués à se surpasser et à proposer des choses nouvelles. A côté de cela, le milieu de la création propose tout un vivier d’auteurs, d’artistes qui proposent des spectacles inclassables, tant les croisements avec le cirque, le théâtre, la danse contemporaine sont riches. Battles et créations avancent en parallèle. Cela permet aux danseurs de progresser techniquement, et aux chorégraphes d’inventer une gestuelle qui continue d’évoluer.

Sur la question des liens avec le contemporain, a-t-on dépassé le vieux débat d’un mouvement hip hop qui aurait perdu son « essence » ?
M. M. :
Il ne s’agit pas de ça ! On a dit la même chose avec le jazz, avec le rock… A un moment donné, si on avait envie d’évoluer, il fallait qu’on s’intéresse, qu’on s’ouvre, qu’on soit plus à l’écoute de ce qui se passait ailleurs. C’est de faire les choses en bonne intelligence que d’aller se frotter à une danse qui a une autre histoire, une autre expérience, une autre manière d’évoluer… Personne, il y a vingt-cinq ans, n’aurait pensé que le hip hop en serait là aujourd’hui ! On ne le voit dans nul autre pays. C’est grâce à ces croisements, je crois qu’ils font partie de l’histoire de la danse hip hop et qu’il faut les encourager.

Quel point de vue avez-vous sur la question de l’enseignement de la danse hip hop, et du Diplôme d’Etat de professeur de danse ?
M. M. :
Il y a encore beaucoup de fragilités et de lacunes sur cette question. Et quand on parle du devenir du danseur sur le long terme, il existe une sorte de flou inquiétant. J’ai toujours été pour le renforcement de la danse hip hop par la formation, qui pourrait aboutir pourquoi pas à un diplôme. A l’époque, quand on parlait entre chorégraphes, on avait du mal à se mettre d’accord. Aujourd’hui, l’expérience a fait naître une maturité, une  possibilité de discussion sur cette idée d’une formation.

Propos recueillis par Nathalie Yokel

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