Dans l’espace d’Alexandre Fray

« J’ai voulu prolonger le travail que la compagnie a toujours fait à l’intérieur du corps acrobatique avec les phénomènes de gravité et d’inertie du mouvement, dans le salto, la rotation, la mise en équilibre … en le plongeant dans un environnement. Ici, il est baigné de forces. Des champs de forces dessinent l’espace, contraignent le corps et ses capacités d’évolution, et le prédéterminent plus ou moins. Nous créons des mouvements très simples ramenés à l’essentiel, de rotation, d’oscillation, de pendule.

Toutes sortes de trajectoires

Il y a des objets qui pèsent, comme le gros rocher qui ramène vers le bas, ou le sable. D’autres sont plutôt des objets suspendus, des objets-trajectoires, comme le pendule qui dessine une spirale et impose un rythme, la longue barre de cuivre qui tournoie dans l’espace comme une sorte de coup d’épée permanent, ou l’échelle qui impulse un mouvement vers le haut. Et puis il y a la sangle, qui nous accroche et nous permet aussi de tirer vers l’extérieur. Ces objets sont liés à un mouvement ou à une absence de mouvement. Je me suis beaucoup intéressé aux travaux de la chronophotographie, à l’étude du mouvement humain, du mouvement des fluides, du rebond d’une balle, je trouve ça magnifique. Nous acrobates sommes bien placés pour aborder ces sujets et ce rapport au monde. Dans le sillage de cette exploration se pose la question du libre arbitre. L’être humain est responsable de ce qu’il fait, dans un environnement donné il lui appartient de faire des choix, en particulier dans l’urgence. Dans nos gestes comme dans la vie existe une forme d’instantanéité dans la décision, une forme de risque. Et dans la confrontation au poids, on n’est pas toujours à armes égales… »

Propos recueillis par Nathalie Yokel