Créer les conditions de la transmission
En 1998, la chorégraphe Mathilde Monnier a [...]
Olivier Meyer, directeur du Théâtre de Suresnes-Jean Vilar et du Théâtre de l’Ouest Parisien, a créé le Festival Suresnes Cités Danse en 1993, puis en 2007 Cités Danse Connexions, où Nabila Tigane est déléguée générale. Entretien croisé.
Qu’est-ce qui vous a motivé pour créer en 2007 Cités Danse Connexions ?
Olivier Meyer : C’est à la fois une volonté, celle de maintenir une activité tout au long de l’année pour les danseurs et les chorégraphes hip hop, et une opportunité, celle du départ du Conservatoire de Suresnes, qui était situé à l’intérieur du Théâtre. Ce départ laissait vacants des centaines de mètres carrés sur quatre niveaux. En liaison avec le Festival Suresnes Cités Danse, nous avons donc inventé autre chose et aménagé notamment une médiathèque, et deux studios de danse pour Cités Danse Connexions.
« Cités Danse Connexions est là pour identifier les talents. » Olivier Meyer
Quelle est l’identité de Cités Danse Connexions ?
O. M. : Nous sommes d’abord un centre de production et diffusion, essentiellement financé par le Département des Hauts-de-Seine, puis par l’Etat. Notre objectif, c’est la production de spectacles. Nous ne sommes pas un organisme de formation, mais un organisme de perfectionnement pour les danseurs, totalement dirigé et pensé pour monter des productions, pour professionnaliser les danseurs. Nous organisons des auditions destinées à des productions, et ce sont les chorégraphes avec lesquels nous travaillons qui choisissent les danseurs. Cités Danse Connexions est là pour identifier les talents, savoir qui mérite d’être accompagné. Autour des productions nous organisons des ateliers, sur des périodes courtes, permettant de perfectionner la technique mais aussi l’interprétation des danseurs, qui explorent les enjeux dramaturgiques. Les danseurs s’ouvrent ici à d’autres univers. Cette année, dans le cadre de Cités Danse Variations, j’ai proposé à Jérémie Bélingard, danseur étoile de l’opéra de Paris, et à la chorégraphe coréenne Misook Séo, de construire une pièce avec des danseurs hip hop choisis lors des auditions. Pendant un mois environ, ils travaillent à la création d’une pièce de trente minutes.
Nabila Tigane : Les ateliers et master class soutiennent la création et permettent aux danseurs de se sentir mieux dans les propositions des chorégraphes. Dans le prolongement du festival Suresnes Cités Danse, Cités Danse Connexions a acquis au fur et à mesure des auditions un savoir-faire et une expertise dans la mobilisation des danseurs au moment de l’audition, et dans l’organisation et la capacité à identifier les bons danseurs. D’audition en audition, on retrouve les mêmes danseurs, un noyau se constitue.
O. M. : Nous voulons d’ailleurs tisser une relation privilégiée avec un groupe de danseurs repérés comme excellents, avec un vrai talent et une vraie disponibilité, en organisant notamment des actions de sensibilisation dans huit villes du département des Hauts-de-Seine.
Les candidats aux auditions sont-ils nombreux ?
N. T. : Il y a une dizaine d’années, nous recevions entre 20 et 30 dossiers. Aujourd’hui, entre 150 et 200 danseurs se présentent. Nous sommes l’un des seuls lieux en France à continuer de produire et à faire en sorte que les jeunes puissent se professionnaliser en participant à l’une des aventures de Suresnes Cités Danse. Cités Danse Connexions s’avère souvent un tremplin. Les danseurs nous font confiance et ont envie de se frotter à d’autres esthétiques. Les choses ici sont très structurées avec une équipe administration, production et diffusion.
O. M. : Quand on a débuté en 1993, la danse hip hop était rare dans les théâtres. Aujourd’hui, des danseurs devenus chorégraphes sont à la tête de Centres Chorégraphiques Nationaux, – Kader Attou à La Rochelle, et Mourad Merzouki à Créteil. C’est une reconnaissance incroyable pour la danse hip hop. Cités Danse Connexions est un lieu de production, diffusion et transmission de la danse, qui donne du travail immédiatement à ceux dont on a repéré le talent. Nous accompagnons en France et à l’étranger la diffusion des œuvres réussies. Les pièces créées à Suresnes de Blanca Li, Laura Scozzi, Nathalie Pernette, José Montalvo et d’autres habitués de notre théâtre connaissent un succès international. Paradis de Montalvo, construit en partie avec des danseurs choisis lors des auditions de Suresnes, a fait le tour du monde ! Les auditions ont constitué une première étape dans la vie professionnelle de nombreux danseurs.
Propos recueillis par Agnès Santi