Hearing

Hearing a déjà parcouru de nombreux festivals européens, dont le Zürcher Theatre Spektakel, à Zürich, où nous avions pu voir cette pièce pour sa première en Europe, et le Festival d’Avignon 2016. Hearing a bien été créé et représenté à Téhéran, avant de voyager, ce qui peut étonner tant le spectacle égratigne largement les systèmes de surveillance mis en place au nom de la morale  en Iran.  Koohestani évoque par ailleurs ces hommes du « Conseil de Surveillance et d’Evaluation », qui rentrent incognito lors  des premières au théâtre, et répandent le plus souvent dans la salle une atmosphère glaçante. S’ils entravent sa liberté d’expression, ces sbires du pouvoir conduisent aussi Koohestani à toujours tenter d’atteindre  dans ses pièces « un équilibre précis : suggérer juste assez pour inciter le spectateur à constituer le puzzle malgré les pièces manquantes, mais pas davantage, pour ne pas titiller les antennes des censeurs ».

La question de la vérité et de l’image

La nécessité de cet équilibre joue sans doute un rôle dans la délicieuse subtilité de Hearing. L’histoire se concentre sur un enjeu : à l’internat, une jeune fille a entendu une voix d’homme dans la chambre de son amie. Toutes deux se retrouvent interrogées par la surveillante en chef de l’internat à qui on a rapporté l’affaire. La quête de la vérité va être longue et tortueuse. Surtout, elle va dévoiler petit à petit des enjeux cachés pour chacune des protagonistes. Psychologique, politique mais menant aussi réflexion sur la question de la vérité et de l’image, cette pièce est à la fois d’une simplicité redoutable et d’une grande profondeur. Magnifiquement interprété, mêlant l’emploi de la vidéo  à une mise en scène dépouillée, Hearing constitue un rendez-vous incontournable.

Eric Demey