Grief and Beauty de Milo Rau : un théâtre qui oblige à ressentir
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Frédéric Leidgens met en scène Le Roman d’un être de Bernard Noël, recueil de grands entretiens menés entre l’auteur et l’artiste Roman Opalka (1931-2011). Il éclaire l’œuvre singulière du peintre, qui consistait à figer le temps, par la peinture et la photographie.
Qu’est-ce qui vous a intéressé dans la démarche artistique de Roman Opalka et dans la mise en lumière qu’en a faite Bernard Noël ?
Frédéric Leidgens : D’abord la singularité extrême de ses tableaux qu’il appelait les Détails. Je pense qu’il est le seul au monde à avoir réalisé une telle œuvre. Il a commencé à peindre le chiffre 1 sur une toile noire, et il a terminé quarante-cinq ans plus tard avec le nombre 5569249, sur des toiles au fond chaque fois un peu moins noir. Grâce à l’éclairage qu’en donne son ami Bernard Noël, j’ai compris cette arithmétique du temps, du temps qui passe et ne reviendra pas. Bernard Noël a su transmettre avec des mots très simples tout ce qu’Opalka lui expliquait de sa démarche, puisqu’il lui a ouvert son atelier durant de grands entretiens, entre 1985 et 1996. Cet aller-retour entre l’artiste-écrivain et l’artiste-peintre, je l’ai trouvé très beau et rare.
Comment l’esthétique de Roman Opalka et ses échanges avec Bernard Noël sont-ils donnés à voir sur scène ?
F. L. : Dans son texte, Bernard Noël fait entendre deux voix non identifiées. La conversation est ici transmise par Sophie Robin et moi-même. Comme Marguerite Duras l’exprime dans La Vie matérielle : le plus beau théâtre est le théâtre lu. Je suis assez d’accord avec cette vision. La temporalité du spectacle s’étale sur les quinze ans d’entretiens entre les deux hommes. L’univers esthétique des autoportraits photographiques, qu’il a réalisés après ses séances de travail au fil des ans, est vecteur du temps puisque le spectateur le voit vieillir au fil des images. Nous avons des enregistrements où Opalka, qui craignait de se tromper, énumère cette suite de nombres à voix haute, en polonais. Nous allons faire apparaître ces autoportraits, à certains moments, et à des âges différents, sans les dévoiler complètement. Ce mouvement du temps est fascinant.
Propos recueillis par Louise Chevillard
à 20h30, le dimanche à 16h30. Relâche le lundi. Durée : 1h30. Tél : 04 72 77 40 00.
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