Thierry Beauvert et Pierre Korzilius
©Crédit : T. Beauvert : Radio France/Christophe Abramowitz ; P. Korzilius : Patrice Schmidt
Crédit : T. Beauvert : Radio France/Christophe Abramowitz ; P. Korzilius : Patrice Schmidt
Publié le 10 mars 2008
Rencontre entre deux institutions
Alors que la concurrence est à son paroxysme entre les différentes salles de concerts parisiennes, le département musique de Radio France et l’Auditorium du musée d’Orsay ont choisi de s’unir à la faveur de l’intégrale Beethoven. Leurs directeurs respectifs nous expliquent la genèse de ce projet.
Pourquoi avoir choisi de dédier un cycle à Beethoven, compositeur déjà bien présent durant les saisons de concerts ?
Thierry Beauvert : L’idée est partie de la demande des artistes. Les Ysaÿe souhaitaient jouer et enregistrer l’intégrale des quatuors, Jean-Marc Phillips-Varjabédian et Michaël Levinas voulaient présenter le corpus des sonates pour violon et piano. Quant au cycle des symphonies, il symbolise la fin d’une époque : celle de Kurt Masur à la tête de l’Orchestre National de France.
Pierre Korzilius : Beethoven ne correspond pas directement à la période du musée d’Orsay. Mais il a fortement fasciné les plasticiens du XIXème siècle. Je souhaitais depuis longtemps donner les transcriptions des symphonies de Beethoven pour piano. Nous avons ainsi déniché des œuvres rares, comme la version de la 9ème symphonie pour soliste, chœur et piano.
La programmation met en perspective Beethoven et des compositeurs français. Quels liens peut-on tisser entre eux ?
P.K. : Il y a trois axes. En premier lieu sont à l’honneur les compositeurs français contemporains de Beethoven, comme Hyacinthe Jadin ou le Chevalier de Saint-Georges. D’autre part, il y a les néo-beethovéniens, comme Lalo, qui font dans leurs œuvres de véritables références stylistiques au compositeur. Enfin, les rencontres du troisième type : ce sont les compositeurs qui se sont confrontés à l’ombre tutélaire de Beethoven, comme Fauré.
Les concerts du musée d’Orsay sont gratuits. A l’heure où le gouvernement expérimente la gratuité dans les musées, quelles peuvent être les retombées pour les concerts de musique classique ?
T.B. : Radio-France offre depuis longtemps une programmation gratuite pour la musique de chambre et la création. C’est une mission publique. On peut prendre des risques, aller chercher un nouveau public… La gratuité crée aussi un autre rapport avec les artistes : même si on les paie normalement, ils acceptent plus facilement d’adapter leur programmation à nos besoins. Mais on ne veut pas tuer la musique payante à Paris.
« Lecycle des symphonies couronne la fin d’une grande époque : celle de Kurt Masur à la tête de l’Orchestre National de France » Thierry Beauvert
P.K. : La gratuité est un sujet ancien. D’ailleurs, cela fait longtemps que les musées nationaux sont gratuits le premier dimanche du mois. Pour pouvoir désengorger les concerts, nous doublons l’intégrale des quatuors. Nous assumons cette gratuité même si cela peut faire grincer des dents.
L’auditorium du musée du Louvre programme en même temps un cycle Beethoven. N’y a-t-il pas un risque de doublon ?
P.K. : Le Louvre propose un cycle de films et huit concerts. Deux concerts se chevauchent dans nos programmations. Cette situation est habituelle dans le paysage musical parisien. Il y a entre 10 et 15 % de doublons d’œuvres entre les salles.
« Nous avons déniché des œuvres rares, comme la version de la 9ème symphonie pour soliste, chœur et piano » Pierre Korzilius
Quel est le soutien de France Musique pour ce cycle ?
T.B. : Nous retransmettrons les concerts, soit une cinquantaine en tout. Avec le système de streaming, les auditeurs pourront réécouter les concerts qu’ils souhaitent. Mais, nous ne mettons pas en place des journées spéciales, car il y aurait alors un risque d’overdose Beethoven !
Propos recueillis par Antoine Pecqueur