La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

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Rencontre entre musique et danse

Rencontre entre musique et danse - Critique sortie Classique / Opéra
Légende : D’heureux hasards entre danse et musique. Photo : Laurent Philippe

Publié le 10 janvier 2008

L’Ensemble 2e2m, engagé dans la transdisciplinarité, partage la scène avec la Compagnie de l’Entre-Deux.

Au terme d’un siècle marqué par la collaboration entre Stravinsky et Balanchine ou les expérimentations de Cage et Cunningham, on pourrait croire que les « relations danse-musique » sont couramment questionnées… Force est de constater que tel n’est pas le cas. Avec l’Epanchement d’Echo, l’Ensemble 2e2m ouvre le dialogue entre le compositeur Gérard Pesson et le chorégraphe Daniel Dobbels. La commande adressée au chorégraphe par la Biennale nationale de danse du Val-de-Marne était claire : la danse devait cohabiter avec les musiciens interprétant deux œuvres de Gérard Pesson – Rescousse et Mes Béatitudes – sans pour autant leur être assujettie, notamment en termes de durée. La musique commence sans les danseurs, qui continuent de danser après que les musiciens se sont tus.
Comment « répondre » à la musique de Gérard Pesson ? « Il fallait, sinon une écriture chorégraphique lisse, du moins des suspensions de temps, qui permettent que la variété musicale soit entendue – car la musique de Gérard Pesson produit un événement toutes les quinze ou trente secondes ! – et que, de temps en temps, les écritures chorégraphique et musicale se touchent, suite à une coïncidence et non à un calcul, souligne Daniel Dobbels. Avec les danseurs, nous avons donc commencé par travailler sans musique. Nous en écoutions parfois un passage lors de nos pauses, mais je ne souhaitais pas « coller » aux œuvres musicales. Je ne pouvais pas m’en approcher en espérant maîtriser la complexité de l’écriture, la pensée du compositeur… Walter Benjamin a dit qu’il n’y avait plus d’aura, mais les œuvres continuent de nous impressionner : là, nous devions au contraire trouver une simplicité de la relation. Le corps peut s’approcher de la musique sans peur. De la même façon qu’un danseur apprend à ne pas avoir peur du corps de l’autre. »
 
« Des gestes-sons »
 
Cette approche « par le hasard » met le spectateur en alerte : entre danse et musique, d’étranges correspondances apparaissent, plus comme des cadeaux que comme des événements voulus et réitérables. « Justesse n’est pas synchronisation », rappelle Gérard Pesson, qui remarque que la musique se fait entendre différemment lorsque 2e2m l’interprète auprès des danseurs. « Ce que le travail de Daniel Dobbels met en jeu est cela : écouter, et plus encore, faire écouter. Il fait entendre, ni plus ni moins qu’un compositeur, le contact d’un corps contre le sol, le phrasé d’un pied frotté rapidement sur le tapis de danse, comme un archet sur l’unique corde qu’est le plateau. La danse fait écouter la musique, mais elle fait aussi écouter la musique dans la danse ». Cette attention à la composante sonore de la danse fait écho à une caractéristique étonnante de la partition musicale : le mouvement des musiciens fait partie de la musique, par le biais de ce que le compositeur appelle des « gestes-sons », inscrits dans la partition. Alors, face à une telle œuvre, faut-il écouter la musique, regarder la danse ? Le coup de maître consiste en fait à nous amener à écouter la danse et regarder la musique. Ce qui peut aussi être une façon de les approcher librement, « sans peur », pour reprendre les mots et le projet du chorégraphe.

Marie Chavanieux


A propos de l'événement



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